Présence oblate1870-1979. Situation géographique : ville voisine d’Ottawa

Avant l’érection canonique, le père Durocher fit bâtir une humble chapelle badigeonnée de rouge, appelée « chapelle des chantiers » sur un terrain, cédé le 16 septembre 1846 par R. Wright. Le père en est le premier desservant de 1853 à 1870 et il réside à l’évêché d’Ottawa. Le 5 juin 1888, un incendie détruisit l’église, le presbytère et 400 maisons. Dès octobre, le père Reboul fit commencer les travaux d’excavation et de maçonnerie pour la construction d’une nouvelle chapelle. Le soubassement fut achevé le 15 septembre 1889. Le 30 août 1891, la chapelle du soubassement fut ouverte au culte et le 25 septembre 1892, c’est l’église qui fut bénite par l’Archevêque, Mgr Duhamel. L’église en pierre fut érigée canoniquement le 17 novembre 1890 par Mgr Guigues, évêque d’Ottawa et celui-ci signa une Convention en faveur des Oblats de Marie Immaculée. Le document en donne les raisons qui suivent :

« Dans le but d’accorder à la population catholique du village de Hull les avantages du service religieux par une communauté des RR. PP. Oblats, ainsi que la demande en a été faite par une pétition adressée à sa Grandeur l’évêque d’Ottawa en date du 16 avril 1870 et signée par 280 citoyens; également pour donner à son diocèse une communauté de missionnaires qui puissent prêter leur ministère au clergé des paroisses et porter les secours de la religion aux nombreux chantiers disséminés dans les bois de l’Ottawa — Sa Grandeur Joseph Eugène Guigues, évêque d’Ottawa conclut les conventions suivantes avec le père Vandenberghe, provincial du Canada pour les PP. RR. Oblats :

1. Toutes les conventions antérieures faites avec la Congrégation des Oblats relativement au service de l’église cathédrale d’Ottawa sont déclarées annulées par le présent acte;

2. Les RR. PP. Oblats deviennent les desservants ordinaires des catholiques de N.-D. de Hull;

3. Les titres de propriété pour le terrain de l’église en construction à Hull seront donnés en due forme à la corporation des pères oblats;

4. Les RR. PP. de la communauté de Hull continueront à faire le ministère des chantiers, comme il a été fait jusqu’ici, les retraites annuelles pour les hommes des chantiers continueront à se prêcher à la cathédrale aussi longtemps que l’évêque le jugera convenable au bien de l’œuvre;

5. Monseigneur l’évêque d’Ottawa fera continuer aux pères oblats l’allocation annuelle payée pour les chantiers;

6. Les RR. PP. Oblats s’engagent : a) à continuer les travaux de l’église avec le concours de la population, b) à rembourser 4500 $ (quatre mille cinq cents piastres) avancées pour la bâtisse de l’église par Mgr l’évêque.

Les conventions, acceptées et signées pour les deux parties le 12 novembre 1870, furent sanctionnées par un document épiscopal instituant la communauté des pp. Oblats à Hull, deux jours plus tard, le 14 novembre 1870, établissant ainsi la paroisse de N.-D. de Grâce à Hull:

« Parmi les objets que nous regardions comme les plus propres à éveiller notre sollicitude, écrit l’évêque, celui de la desserte de la paroisse Notre-Dame de Grâce occupait un des premiers rangs. La proximité de cette paroisse de la ville d’Ottawa, son développement subit et très considérable, la qualité des personnes généralement peu instruites et pauvres dont elle était composée, le peu de liaison entres les familles accourues de partout, l’exposaient à toutes sortes de désordres, et réclamaient par les mêmes soins particuliers.

Il nous a paru que, pour satisfaire aux besoins de cette desserte déjà importante, le dévouement d’une communauté était avantageux et même indispensable. Nous avons donc porté nos regards sur celle des RR. PP. Oblats qui avaient déjà consacré leurs peines et leur travail pour former cette nouvelle population.

Deux raisons particulières sont venues confirmer cette nouvelle résolution : la première est que le clergé séculier commence à sentir le besoin d’appeler des missionnaires pour donner des retraites dans les paroisses. Cet établissement, rapproché du premier pasteur, offrira une position très convenable pour la résidence des missionnaires qui évangélisent le diocèse et pour les pères qui vont dans les chantiers. La seconde raison est que la dette actuelle étant déjà considérable, et les œuvres qui restent à accomplir étant très nombreuses, un prêtre séculier pourrait difficilement en prendre la responsabilité. Tandis que l’esprit de sacrifice et de dévouement des PP. PP. Oblats, nous est bien connu, nous permet d’espérer que non seulement ils suffiront à ces œuvres, mais qu’après des années d’un travail pénible, ils pourront obtenir même des ressources pour les aider dans l’accomplissement des œuvres de dévouement qu’ils se sont imposées dans l’intérêt du diocèse.

En conséquence, nous chargeons la communauté des pères Oblats de la desserte de Notre-Dame de Grâce, à Hull. La pétition qui nous a été adressée le 16 avril 1870, et signée par 280 catholiques, me prouve que cette nomination sera acceptée dans la paroisse avec la plus grande satisfaction.

Nous concédons également la propriété du terrain de l’église à la susdite communauté, à la charge de desservir cette paroisse conformément aux règles du diocèse, et de payer les dettes déjà contractées, et de terminer les travaux avec l’appui et les secours des catholiques confiés à ses soins.

Nous désignons le Supérieur de la communauté comme curé de la paroisse, lui donnant la liberté de se faire aider, et même remplacer, pour la desserte qui lui est confiée par quelqu’un des pères de la communauté. Nous avons l’assurance que la régularité des membres qui la composent, et leur fidélité à observer les règles du diocèse offriront à tout le clergé un grand exemple, et l’encouragement dans l’accomplissement des œuvres qui lui sont confiées. Joseph Eugène, évêque d’Ottawa.

Ce fut ainsi que fut créée la paroisse oblate de N.-D. de Grâces à Hull.

Malheureusement, l’église et le presbytère furent détruits par le feu en juin 1888. On se retroussa les manches rapidement et les plans de construction du nouvel édifice furent prêts à la fin d’août. Pour financer la dette, on organisa une loterie spéciale.

En décembre, les travaux d’excavation du presbytère et de l’église furent terminés. Mais évidemment, on ne put avoir la messe de minuit cette année-là.

Le 13 mai 1890, le père Lauzon nous apprend que le clocher ne sera terminé qu’à l’automne 1891 quoique les travaux à l’intérieur de l’église se continueront l’hiver.

Le 11 février 1891, les Oblats empruntèrent 25 000 $ en vue de parachever la construction de l’église de N.-D. de Grâce qui avait passé au feu trois ans plus tôt. Pour « sureté » et garantie, la Corporation hypothèque les lots et les terrains sur laquelle se trouve la nouvelle église et ses dépendances avec « transport d’assurance contre les accidents du feu [78 325 $] ».

Malgré les nombreuses conflagrations qui ont accumulé beaucoup de ruines à Hull, la construction des édifices religieux et leur restauration n’ont pas été fréquentes et encore moins à charge de la paroisse. L’histoire rapporte que, à ses débuts, la paroisse était bien pauvre et que le coût du nouveau temple, bien que construit avec économie, ne pouvait être défrayé par les seuls paroissiens. La Congrégation des Oblats dû investir une grande partie du capital requis pour cette construction. La dette était encore assez élevée quand cette église devint la proie des flammes. C’est dire dans quelle situation se trouvaient les pasteurs de Notre-Dame pour relever l’église et le presbytère de leurs ruines. Il leur a fallu consentir encore une fois à laisser la somme investie dans la construction de la première église et recommencer de nouveau avec l’humble partie des assurances qui leur revenaient après avoir remis les argents étrangers empruntés.

Pour la période de quarante trois ans plus tard, peu de restaurations ont été effectuées. Les registres paroissiaux en signalent trois de quelque importance : en 1909, la décoration de l’église, l’érection des tours pour la protection contre l’incendie en 1911, et l’achat des orgues en 1915.

Mais on ne peut guère pousser plus loin cet esprit d’économie : le système de chauffage, garanti pour vingt ans, dépasse ses quarante années. La sécurité du public fait un devoir de ne pas tarder davantage. Le clocher demande à être fortifié sur ses bases pour résister aux violences des tempêtes. Pour se conformer aux règles gouvernementales, il est nécessaire d’améliorer l’installation électrique. Les foules de l’église et du sous-sol qui se rencontrent dans le même portique lors des célébrations du dimanche et des jours de fête sont exposées à être victimes d’accidents en cas de panique. De plus, sans ajouter beaucoup au montant à dépenser pour les réparations urgentes, on doit mettre l’église à l’épreuve du feu. Les améliorations projetées ne peuvent se comparer, en ce qui concerne le coût, aux dommages que pourraient causer une incendie. Enfin, personne ne peut refuser de se rendre à l’idée qu’un grand ménage de l’église est nécessaire après 23 ans d’utilisation constante.

Voilà ce qu’on a projeté pour la restauration de l’église N.-D. de Grâce le 24 avril 1932. Mais on ne peut tout prévoir ce qui arrive. C’est ainsi que le feu se déclare dans le clocher à 5h30 un dimanche matin le 12 septembre 1971. L’émotion est grande. Le feu a endommagé gravement l’église. Le clocher s’est effondré. Le toit a brûlé. Seule la voûte intérieure du toit résiste, non sans laisser des traces irréparables.

Le Conseil d’administration de l’Assemblée paroissiale se réunit plusieurs fois pour étudier la situation. Va-t-on reconstruire ou simplement démolir ce qui reste de l’édifice ? On fera diverses propositions toutes plus intéressantes les unes que les autres jusqu’à une décision définitive par une lettre de Mgr Paul.-É. Charbonneau du 21 mars 1972 qui se lit comme suit :

« À tous ceux qui seraient intéressés de savoir la position de l’évêque de Hull, au sujet de l’église Notre-Dame de Hull…

Depuis l’incendie de l’église Notre-Dame de Hull, le 12 septembre 1971, j’ai suivi de très près et avec d’intérêt tout le travail de réflexion et de planification accompli avec un sens pastoral très sérieux par le père curé et les responsables religieux et laïcs de la paroisse. Je tiens à les féliciter de leur réalisme et de leur ouverture pastorale. […]

1) La restauration de l’église Notre-Dame, comme lieu de culte, est un projet trop coûteux et irréaliste pour une paroisse dépeuplée et appelée à changer d’aspect dans une avenir prochain.

2) Il faut respecter les corps publics qui, pour des raisons historiques ou pour des

projets culturels tiennent à restaurer l’église Notre-Dame. Toutefois, ces même corps publics devront prendre eux-mêmes la responsabilité financière de la restauration et de l’entretien de l’édifice.

3) La paroisse Notre-Dame reste libre de l’option qu’elle a prise pour une pastorale adaptée à notre temps : centre communautaire ou intégration dans un complexe.

J’ose espérer que le dialogue si bien établi entre la communauté oblate et les paroissiens d’une part et le Comité spécial de la S.H.O.Q. d’autre part apportera une solution qui saura répondre aux aspirations pastorales bien légitimes des uns et aux désirs esthétiques, pratiques et historiques des autres. Paul-É. Charbonneau, évêque de Hull ».

Eugène Lapointe OMI