Présence oblate : 1897-1921. Situation géographique : nord-ouest du Québec

1) Comme introduction à cette notice historique, il est intéressant de lire le premier récit de missionnaires au Témiskaming [ancienne orthographe du nom]. Il s’intitule : faits historiques sur l’arrivée des premiers missionnaires au district et au Fort de Témiskaming (sans date, ni année, mais probablement en 1839, si l’on se fie au texte plus bas). Le texte est en anglais.

En 1836, Mgr Lartigue fut nommé évêque de Montréal. Durant sa visite pastorale de Longueuil, il demanda au Rév. Chs. de Bellefeuille, de l’ordre des Sulpiciens, et au Rév. Mr. J. B. Dupuy, prêtre séculier de la paroisse Saint-Jacques de Montréal, de partir le 20 juin pour le district de Témiskaming.

Ils firent le voyage en bateau à vapeur de Montréal à Bytown, puis de là au Fort Témiskaming en canot d’écorce (avec difficulté, dit le texte). Ils arrivèrent à Témiskaming le 14 juillet. Les deux missionnaires furent heureux de la généreuse hospitalité offerte à leur arrivée par les officiers de la Compagnie de la Baie d’Hudson.

Aucun Amérindien ne resta au Fort, autres que ceux qui accompagnaient les missionnaires. Tous ceux qui campaient auparavant s’enfuirent dans les bois quand ils apprirent que les hommes de prière avaient pris possession du poste de la Baie d’Hudson pour punir les pécheurs. Seul un Indien eut le courage de demeurer à courte distance, et il était sans doute l’un des plus grands pécheurs puisqu’il avait trois femmes qui étaient trois sœurs. En peu de temps, il en abandonna deux.

Le 15 de juillet 1836, on célébra la première messe. On commença la construction d’une croix qu’on planta aussitôt qu’elle fut terminée. On visita les malades, et on fit les préparations pour préparer le bois pour la construction d’une nouvelle église de 32 pieds de long par 22 de large.

Ce ne fut pas long avant que les Indiens apprirent la bonne volonté des missionnaires, et bientôt, des canots chargés d’hommes, de femmes et d’enfants commencèrent à arriver au Fort. Il s’empressèrent à recevoir les instructions des Rév. M. de Bellefeuille et Dupuy, et leurs instructions se prolongèrent parfois jusqu’à 11 heures du soir.

Le 19 juillet, tout étant prêt, c’était un mercredi à 4 heures de l’après-midi, les deux Missionnaires assemblèrent les Amérindiens. Ils leur donnèrent une courte instruction à propos des vertus de la Croix, et ils leur expliquèrent pourquoi elle était érigée et comment ils devaient la vénérer.

L’instruction terminée, ils formèrent une procession, la Croix d’abord portée par des Indiens, les deux Missionnaires venant ensuite, les Indiens suivant en silence, les hommes en premiers, puis les femmes et les enfants.

Une fois tous rendus à l’endroit où la Croix devait être élevée, le Rév. M. de Bellefeuille chanta en Indiens les litanies de la Croix, les deux jeunes Amérindiens qu’ils avaient amené avec eux répondant. Ensuite, ce fut la cérémonie de la bénédiction de la Croix et on chanta : « O Crux Ave: Salut, ô Croix, notre espérance. »

Les missionnaires trouvèrent au Fort un bon vieil homme du nom de Cartier, originaire de St-Ours, P.Q. Il était un vieux voyageur de 96 ans, mais encore frais et alerte. La Compagnie de la Baie d’Hudson prenait soin de lui. Il avait désiré depuis longtemps régulariser l’état de sa conscience et, en voyant la Croix et les Missionnaires, il fut rempli de joie.

Le 27 juillet, manquant de provisions, les missionnaires laissèrent le Fort, les Officiers de la Compagnie de la Baie d’Hudson, ainsi que les Amérindiens qui les accompagnèrent jusqu’au bord du lac pour leur souhaiter un bon voyage de retour en les implorant de revenir bientôt.

Le retour à Montréal dura jusqu’au 16 août 1836.

2) Quant à l’établissement officiel de la Maison du Nord Témiscamingue, il semble que pour toute fin pratique la visite canonique du père Aimé Martinet (rapport du 4 octobre 1891), considère cette maison oblate comme établie. Elle est du même niveau que Mattawa (Matawan). Et les deux maisons sont responsables ensemble de l’Abitibi et de la Baie d’Hudson. Selon la propre expression du père: « La maison de Matawan et celle de Témiscamingue fournissent alternativement ou simultanément les missionnaires d’Abitibi et de la Baie d’Hudson. »

Le visiteur continue : « Il est rationnel que les ressources destinées à ces missions soient concentrées par l’administration provinciale, qu’elle-même en fasse la distribution et qu’elle en recueille le reliquat comme fonds de réserve. Mais c’est toujours par l’intermédiaire du supérieur que ce mouvement d’argent aura lieu et que les comptes seront rendus. Le sujet rend compte à son supérieur, le supérieur au provincial et le provincial à l’évêque si c’est nécessaire. Il n’est pas facile de voir pourquoi un sujet changerait de supérieur par le fait même qu’il va missionner dans la Baie d’Hudson. Cette région n’est pas plus étrangère à Matawan qu’à Témiskaming. Si donc un sujet de l’une ou de l’autre maison est envoyé dans une mission, il relèvera de son supérieur, il recevra la somme allouée et il en rendra compte à son supérieur. »

3) Arrivée des Oblats. Dans une lettre du 14 décembre 1898, le père G. Beaudry écrit au provincial que le père Péreault et lui ont pris possession de leur maison, même si elle est loin d’être terminée. Voici le texte : « Nous sommes arrivés dans notre maison, armes et bagages, depuis ce soir après souper. Rien de plus pressé que de venir vous le dire. N’allez pas croire que tout est fini ! La cuisine est à peu près la seule pièce un peu finie. Vous me direz peut-être que nous n’allons pas vite. Nous avons été retardés par des travaux extérieurs. Le p.

Péreault vous a sans doute dit que nous avions mis la fameuse aqueduc à deux crochets de côté et que nous avions installé une pompe. Cette pompe nous a coûté, mais, Deo Gracias, elle va à merveille. Notre fournaise, sur un plan un peu plus primitif, a demandé aussi beaucoup de travail, Au lieu d’acheter deux ou trois poëles, j’ai acheté un gros poële de chantier que j’ai payé 11 piastres et que nous avons placé dans la cave, ensuite emmuré de roche et de glaise. Il suffit amplement pour chauffer toute la maison, et nous n’avons pas de poële pour embarrasser nos petites salles. Je ne sais pas du tout si nous aurons fini nos travaux quand le temps marqué par le père Duvic sera expiré. Les frères font de leur mieux et nous ce que nous pouvons, mais le temps passe et Noël approche. Si le fr. Cadieu nous restait… Serait-ce trop vous demander de travailler à supplier au scolasticat en leur envoyant un bon frère de manière à ne pas trop les déranger. Le fr. Cadieu ici, c’est à peu près parfait. Il est sérieux, réservé avec les étrangers, soigneux, et très pieux; en même temps, il ne semble pas trop se déplaire. Je l’ai demandé à notre Rév. Père Général. Au printemps, il nous faudrait bâtir une grange; en argent, il est certain que nous ne sommes pas capables. Si vous pouviez nous l’obtenir auprès du Rév. Père Duvic, vous nous rendriez un grand service. »

4) Remise de la paroisse à l’évêque. En tant que nouveau provincial de l’Est du Canada, le père G. É. Villeneuve, provincial, écrit à Mgr Latulipe, évêque d’Haileyburry, le 23 mars 1921. Il lui annonce: « C’est avec peine, Monseigneur, que je me vois obligé, dans cette première lettre que j’ai l’honneur de vous adresser, de vous parler de l’abandon de Nord- Témiscamingue. Les négociations, à cet effet, eurent lieu entre votre grandeur et le Rév. Père Charlebois. Mais comme il était nécessaire, la chose fut soumise à notre Conseil général à Rome. Je viens de recevoir une communication m’annonçant que, le 18 février dernier, Monseigneur le Révérendissime Père et son Conseil ont approuvé notre départ de Nord- Témiscamingue. Par les présentes, je vous prie donc officiellement de bien vouloir accepter la rétrocession de la paroisse de Nord-Témiscamingue que nous faisons à votre Grandeur. Monseigneur, je tiens à vous répéter, après le Rév. P. Charlebois, à cause de notre parfaite liberté dans l’abandon que nous vous faisons de cette mission, que nos Pères en se retirant conserveront de leur séjour à Nord-Témiscamingue un souvenir plein de reconnaissance; au surplus, ils laisseront au nouveau pasteur et à son peuple leurs vœux de bonheur. Et nous continuerons de prodiguer nos soins et notre dévouement aux chères populations qu’il plaira à votre Grandeur de nous confier. »

Eugène Lapointe OMI