1. Origine
  2. Sources
  3. Signification globale de la préface
  4. Division et titres des paragraphes de la préface
  5. Commentaire de chacun des paragraphes
  6. Les supérieurs généraux
  7. Conclusion

Une dizaine d’Oblats ont commenté nos Constitutions et Règles [1]. Certains d’entre eux seulement se sont brièvement arrêtés à la Préface en proposant quelques réflexions de caractère historique ou spirituel. Je ne me propose pas de combler cette lacune, mais simplement de faire le point sur l’état de la question: qu’a-t-on écrit sur l’histoire, les sources, le sens de la Préface de nos Constitutions et Règles?

ORIGINE

Dans sa forme actuelle, la Préface a été rédigée en 1825, peu avant la présentation des Règles à Rome en vue de leur approbation [2]. Elle se trouvait cependant, sous une autre forme, dans le premier manuscrit des Règles de 1818. Elle est, en effet, le résultat de la fusion du Nota bene qui suivait le chapitre premier de la première partie avec l’avant-propos du texte de 1818 [3].

Cet avant-propos forme, avec quelques changements, le contenu des paragraphes 8, 9 et 10 de la Préface actuelle, pendant qu’on retrouve une bonne partie du Nota bene dans les sept premiers paragraphes.

Règles de 1818 Préface de 1826

Avant-propos Paragraphes 8-10

Nota bene Paragraphes 1-7

L’avant-propos affirmait que certaines Règles de vie étaient nécessaires pour assurer l’unité d’esprit et d’action entre les prêtres à qui le Seigneur a inspiré de se «réunir en communauté pour travailler plus efficacement au salut des âmes et à leur propre sanctification».

Le Nota bene suivait le chapitre qui exposait les fins de l’Institut. Il expliquait la troisième en faisant l’analyse de la situation critique de l’Église et de ses causes dont la «principale», «racine» des autres, est «la paresse, la nonchalance et la corruption des prêtres», d’où, pour répondre aux besoins les plus urgents, la nécessité d’avoir des hommes vraiment apostoliques qui, entre autres buts, travaillent à la réforme du clergé.

Dans le transfert du Nota bene à la Préface [4], le Fondateur a omis le premier paragraphe, pourtant très important; il a supprimé «certaines expressions trop sévères et trop oratoires» [5] et tout ce qui était trop négatif contre les mauvais prêtres, de façon à donner à la Préface une perspective plus positive et plus large.

À Rome, quelques phrases du texte ont également été changées par le Fondateur et Mgr Marchetti, à la suite des observations faites par le cardinal Pedicini [6]. Ainsi, «l’Église […] ne lui enfante presque plus que des monstres» du premier paragraphe, est devenue «cette épouse chérie, pleurant la honteuse défection des enfants qu’elle a engendrés», puisque l’Église n’engendre pas de monstres. Dans le même paragraphe l’expression latine, qui ne se trouvait pas dans le texte français: «criminum suorum mensuram implevere» est devenue «irritavere justitiam divinam sceleribus suis» puisqu’on ne peut mettre une mesure à la justice de Dieu. Le début du paragraphe deux était mal traduit par «Divinis rebus ita flebiliter compositis»; on en a fait une traduction littérale du français: «In hoc miserrimo rerum statu».

Dans toutes les éditions successives des Règles, ce texte est ensuite demeuré identique, à quelques minimes corrections près. Composée en français, la Préface a été publiée en latin dans toutes les éditions de 1827 à 1966. Depuis 1966, elle est publiée dans la langue des diverses éditions des Constitutions et Règles.

Contrairement à la jurisprudence romaine, la Préface a été admise en 1826 comme faisant partie intégrante des Règles; elle l’est encore aujourd’hui [7].

SOURCES

Les commentateurs des Règles s’accordent à dire que la Préface a été rédigée par le père de Mazenod et est le fruit de sa pensée et de sa vie. Ils reconnaissent cependant diverses influences.

Le père Georges Cosentino écrit en 1955: «Bien qu’elle puisse se présenter comme œuvre originale de notre Fondateur, la Préface de nos Règles (comporte) plusieurs réminiscences sulpiciennes. Ainsi, par exemple, nous y trouvons quelques idées qui se rencontrent (chez) Tronson et (chez) Olier; c’étaient les idées sur le sacerdoce et l’esprit ecclésiastique qu’on inculquait à Saint-Sulpice. Au reste, en confirmation de cela, dans la conférence pour le jour de l’ordination que notre Fondateur fit au séminaire (23 décembre 1809), nous trouvons diverses idées de notre Préface; c’étaient des idées qu’on lui avait inculquées au temps de son séminaire» [8].

En 1956, le père Léo Deschâtelets fait une comparaison entre le texte de la Préface et celui de plusieurs lettres et conférences d’Eugène entre 1808 et 1818. Il écrit à ce sujet: «On croirait facilement trouver dans la Préface des réminiscences des écrits antérieurs. Ce qui est certain, c’est qu’elle nous livre les pensées les plus intimes du Fondateur, celles qu’il a le plus profondément vécues» [9].

Le père Deschâtelets confirme ainsi ce qu’affirmait le père Cosentino. Eugène, séminariste, a lu et s’est pénétré des écrits de Tronson, d’Olier, etc., sur le sacerdoce. Ses écrits, à partir de 1808, reflètent cette pensée au point qu’il l’assimile. Elle devient sienne et apparaît dans les paragraphes de la Préface où il est question de mauvais prêtres et de la nécessité d’unir les forces des bons prêtres qui tendent vers la perfection et veulent sacrifier leur vie pour le salut du monde (paragraphes 2, 3, 4, 6 et 8).

En 1967, le père Jean Drouart a fait une brève étude sur les Règles, en particulier sur l’expression «hommes apostoliques» que l’on trouve au paragraphe 4 de la Préface. Il y voit l’influence de la première épître de saint Paul aux Corinthiens que, apparemment, le père de Mazenod connaissait bien. On verra plus loin le commentaire du père Drouart à ce propos, un des meilleurs que nous ayons [10].

Enfin le père Fernand Jetté, dans son commentaire des Constitutions et Règles, affirme ceci: «Sans aucun doute [la Préface] est d’Eugène de Mazenod. C’est lui qui l’a écrite, en s’efforçant de la vivre et à la lumière de sa propre expérience. À cette époque, par ailleurs, plusieurs chrétiens souffraient des maux de l’Église et rêvaient des moyens possibles pour l’aider [11].

Le père Jetté copie à ce point plusieurs pages de l’ouvrage de Félicité de Lamennais, intitulé Réflexions sur l’état de l’Église en France pendant le dix-huitième siècle et sur sa situation actuelle. Ce livre, imprimé en 1809, mais saisi par ordre de Napoléon, ne fut publié qu’en 1814. Félicité de Lamennais l’avait cependant envoyé à monsieur Émery dès 1809. Eugène en prit sans doute connaissance dès ce moment. Au cours des vacances de l’été 1809, il y eut en effet entre monsieur Émery, J.-M.-Robert de Lamennais et autres, dont Eugène, une rencontre pour échanges de vues sur les affaires de l’Église et sur cet ouvrage [12].

Le père de Mazenod semble bien s’être inspiré de cet écrit, surtout dans les premiers paragraphes de la Préface sur l’état de la société, de l’Église et du clergé (voir en annexe le tableau comparatif).

La pensée de Félicité de Lamennais est plus vaste, plus avancée sur certains points, plus nuancée dans les jugements sur l’état du clergé, mais on trouve dans la Préface et le début des Règles le même ton, plusieurs des mêmes idées et quelquefois les mêmes expressions: la honteuse défection des chrétiens, la conduite répréhensible du clergé, la nécessité d’hommes véritablement apostoliques, la puissance de la foi, la simplicité de l’Évangile, l’importance de la croix, etc.

Félicité de Lamennais insiste beaucoup sur l’ignorance religieuse des gens des campagnes et sur l’importance des missions. C’est ce moyen d’apostolat que le Fondateur privilégie et ce sont ces gens-là qu’il choisit d’évangéliser, mais il parle surtout de cela dans les articles sur la fin principale de l’Institut et sur les missions. Ici, dans la Préface, il ne mentionne pas les campagnes et ne parle des missions qu’une fois au paragraphe 10, même si cette réalité en tisse la toile de fond. Le contenu de la Préface reflète beaucoup son origine, c’est-à-dire le fait qu’elle était d’abord une réflexion à la suite des articles sur la réforme du clergé, fin secondaire de la Congrégation.

SIGNIFICATION GLOBALE DE LA PRÉFACE

Le père Jetté conclut ainsi la page où il parle de l’influence de Lamennais: «La Préface de nos Constitutions reprend à sa manière, et selon l’expérience de notre Fondateur, ces mêmes éléments vécus et pensés par [Lamennais]. Il a touché les misères de l’Église, il a vu l’Église abandonnée et trahie par les siens, il a connu les faiblesses et les scandales du clergé, il a vu ce qu’était l’ignorance de la foi et la dégradation chrétienne dans les campagnes. […] Il a senti toutes ces choses, de même que la nécessité de former un bon clergé. […] L’appel de l’Église, il l’a entendu jusqu’au fond de son cœur et il a voulu y répondre par le don de sa vie. C’est ce que nous dit la Préface de nos Constitutions; et en même temps, elle se réjouit de ce que «la vue de ces désordres a touché le cœur de quelques prêtres à qui la gloire de Dieu est chère, qui aiment l’Église et qui voudraient se sacrifier, s’il le fallait, pour le salut des âmes». Cette Préface est un texte à lire et à relire, un texte dont il faut s’imprégner profondément, puisque c’est elle qui nous donne le vrai sens de nos Constitutions» [13].

Tous les commentateurs des Règles ont souligné l’importance de la Préface pour les Oblats et sa signification globale. En 1883, le père Toussaint Rambert disait de l’ensemble des Règles: «Les Règles des Oblats de Marie Immaculée sont l’œuvre capitale du père de Mazenod, elles nous le font mieux connaître que toutes ses autres œuvres. Là est son esprit, sa volonté, son cœur, sa vie intime, son âme tout entière. C’est là que, comme tout fondateur, il a versé tous les trésors de son expérience, de sa sagesse, de sa vertu, aussi bien que toutes les tendresses et les délicatesses de son amour paternel […]» [14].

Dans son commentaire des Règles, le père Alfred Yenveux écrivait également en 1903: «La Préface répond à cette question: par quelles voies providentielles et pour quels motifs s’est faite la fondation de la Congrégation. De tous les écrits de notre vénéré Fondateur, il n’en est pas de plus admirable que ces pages, où Mgr de Mazenod développe le but sublime qu’il s’est proposé en fondant la Congrégation, le plan si beau qu’il a conçu et la haute perfection qu’il demande à ses enfants. On ne peut comprendre parfaitement de telles leçons que si on les étudie devant le saint Tabernacle […]» [15].

Les pères Jean-Marie-Rodrigue Villeneuve et Joseph Reslé ajoutent à leur tour, en 1929 et 1958: «On peut trouver l’esprit du vénéré Fondateur dans cette Préface et en quelque sorte les traits fondamentaux de sa spiritualité qui seront développés subséquemment dans les divers articles […]» [16].

«Quamvis nullam contineat præionem disciplinarem, est tamen pro nobis maximi momenti: revelat spiritum et cor Patris Fundatoris, formam sive ideale viri vere apostolici seu Oblati, prout illud ipse concepit [Bien qu’elle ne contient aucune preion disciplinaire, elle est pour nous de la plus grande importance: elle nous révèle l’esprit et le cœur de notre Père fondateur, la forme ou l’idéal de l’homme véritablement apostolique ou de l’Oblat, tel qu’il le concevait]» [17].

DIVISION ET TITRES DES PARAGRAPHES DE LA PRÉFACE

Dans seulement trois des divers ouvrages qui traitent de la Préface une division est proposée, logique chez le père Reslé, plus pratique chez le père Jetté [18], très philosophique chez le père Gérard Blanchard [19]. Voici ces divisions sous forme de tableau comparé:

1. JOSEPH RESLE

La Préface présente la vie apostolique du Fondateur et des Oblats

a. dans son origine (cause prochaine, occasion)

§ 1. État de l’Église

§ 2. Aggravation (clergé)

§ 3. Compréhension, volonté généreuse de quelques prêtres

b. dans sa fin (œuvre à faire)

§ 4. Œuvre réalisable, optimisme

c. dans son divin modèle

§ 5. Le Christ

d. dans ses principaux moyens

§ 6. Sanctification personnelle

§ 7. Action sacerdotale et apostolique

§ 8. En communauté

§ 9. et 10. Sous une règle et une discipline commune.

2. FERNAND JETTE

a. La vue de l’Église

b. L’appel de l’Église

c. Que fit Notre Seigneur Jésus Christ?

d. Que ferons-nous?

e. Les fruits de salut

f. Nécessité de certaines règles

Dans un article paru dans les Études oblates de 1947, le père Blanchard étudie la structure philosophique de la Préface des Règles. Il la divise en trois parties:

a. An sit? (§ 1-3)

b. Quid sit?

– définition de l’Oblat: homme apostolique (§ 4)
– explication de la définition:
– par la cause exemplaire: Jésus Christ (§ 5)
– par les causes intrinsèques
– genre: hommes vertueux, etc., (§ 6)
– différence spécifique: zélés, etc., (§ 7)

c. Quale sit?
– Qualités qui rendent tangible la définition (§ 8-10).

Cet article du père Blanchard est une réflexion philosophique et spirituelle très dense et un des meilleurs écrits sur la Préface avec ceux des pères Jean Drouart et Fernand Jetté.

COMMENTAIRE DE CHACUN DES PARAGRAPHES

Si les commentateurs des Règles soulignent tous l’importance de la Préface pour bien comprendre la pensée du Fondateur et l’esprit sous-jacent aux nombreux articles des Règles de 1818 et de 1825-1826, ils ne s’arrêtent guère à expliquer chacun des paragraphes.

Le père Jetté semble bien être le premier à parler explicitement du sens de la Préface et à faire quelques réflexions sur les quatre idées principales: aimer l’Église, former l’homme apostolique, se mettre à l’école du Christ, se donner des règles de vie et d’apostolat.

Avant lui, le père Drouart a écrit plusieurs pages profondes sur l’expression: «homme apostolique» du quatrième paragraphe, qu’il explique par le texte du premier paragraphe du Nota bene de 1818: «ils sont appelés à être les coopérateurs du Sauveur, les corédempteurs du genre humain». Cette phrase est curieusement disparue dans les modifications faites en 1825 et n’est pas reparue ailleurs dans les Règles.

On peut dire qu’il n’existe qu’un seul commentaire de l’ensemble de la Préface et de chacune de ses parties. On le trouve, sous forme d’une vingtaine de méditations dans un long article du père Paul-Émile Charland, qui commente les paragraphes par des références à l’Évangile et par des articles des Règles de 1827, conservés dans celles de 1928 [20].

Voici maintenant un bref commentaire de chacun des paragraphes

1. PARAGRAPHE 1

Situation de l’Église

«L’Église, le mystère de l’Église, est au cœur de cette Préface. C’est pour elle qu’Eugène de Mazenod a établi la Congrégation», écrit le père Jetté [21]. Si Félicité de Lamennais a pu influencer le père de Mazenod, on est sûr que sur ce point l’intérêt de celui-ci, sa préoccupation, son amour apparaissent longtemps avant d’en avoir connu l’ouvrage. Cela remonte à Venise et aux réunions que tenaient chaque jour des ecclésiastiques italiens et français chez les Zinelli. On y parlait justement de l’Église [22].

D’autre part, le père et les oncles d’Eugène, qui l’influencèrent profondément, considéraient l’état de la société et de l’Église de France comme désastreux et sans espoir [23].

On voit que, dès 1805, Eugène frémit en constatant l’ignorance religieuse et la barbarie qui existe «encore plus fâcheuse que celle qui régnait dans le sixième siècle» (voir le tableau comparatif).

Un des motifs principaux pour lesquels il a décidé d’entrer au séminaire et de devenir prêtre a été la situation de l’Église. Il en parle souvent avec sa mère de 1808 à 1812, disant qu’il y a peu de prêtres parce que l’Église est pauvre, que peu de vocations proviennent de la noblesse [24], que l’apostasie règne et que l’Église est abandonnée de tout le monde [25], qu’il y a danger de schisme, que la persécution est imminente [26], etc.

Le premier paragraphe reprend des mots et des expressions souvent employés par Eugène. Il a donc écrit ici ce qu’il ressentait et ce dont il vivait depuis longtemps: une sorte de souffrance avec l’Église souffrante après la Révolution.

Comme on le voit dans le tableau comparatif, le texte définitif du premier paragraphe est plus long que celui de 1818, mais moins négatif et moins provocateur.

2. PARAGRAPHE 2
Aggravation de la situation de l’Église à cause des mauvais prêtres — Appel de l’Église

Par rapport au premier paragraphe, on a ici deux idées nouvelles: l’appel de l’Église et le triste état du clergé. Si le père de Mazenod a pu ici s’inspirer de Félicité de Lamennais, il subit surtout l’influence de Saint-Sulpice; mais, comme dans le premier paragraphe, il résume des idées qu’il a faites siennes depuis longtemps et des réalités qu’il a ressenties profondément.

Le 23 décembre 1809 déjà, il parlait de l’appel de l’Église [27]. Quant au clergé peu nombreux et surtout aux mauvais prêtres, il en a parlé souvent entre 1812 et 1818. Peu de prêtres ont porté sur l’état du clergé un jugement aussi dur que celui exprimé par le père de Mazenod dans les trois articles de la Règle de 1818 sur la réforme du clergé et dans le Nota bene qui suit. Quelle triste expérience avait-il eue pour être aussi radical? Il a pu rencontrer, en Sicile et à Aix, des prêtres peu zélés, mais rien dans ses écrits ne nous permet de dire qu’il ait rencontré des prêtres pervers et scandaleux. Il savait cependant bien que pendant la Révolution beaucoup de prêtres s’étaient mariés et avaient prononcé le serment à la Constitution civile du clergé. À Paris, les Sulpiciens insistaient beaucoup sur la nécessité de former de saints prêtres et devaient sans doute rappeler les faiblesses d’une partie du clergé des siècles précédents, de même que certains jugements sévères de saint Vincent de Paul sur le clergé de son temps [28]. Eugène devait alors réagir avec énergie, puisque monsieur Duclaux lui faisait remarquer un jour qu’il avait un tempérament de réformateur et qu’il lui écrivit, le 22 novembre 1812, de ne pas se comporter en réformateur en arrivant à Aix [29].

Il est certain qu’à l’automne 1815, alors qu’il préparait la fondation, il se proposait déjà de travailler dans les missions populaires et aussi à la réforme du clergé. Il en parla à monsieur Duclaux. Nous conservons la réponse de celui-ci, datée du 2 octobre 1815: «Pour moi, je ne puis que remercier mon bon Maître de tous les pieux sentiments qu’il vous inspire. Continuez de travailler de toutes vos forces au rétablissement de la religion; prêchez, instruisez, éclairez les Français, sur la cause des maux qui les accablent; que votre voix se fasse entendre dans toutes les parties de la Provence; le bon Dieu n’attend que notre conversion pour nous combler de ses grâces. Mais formez surtout l’esprit ecclésiastique parmi les prêtres. Vous ne ferez que très peu de bien tant qu’il n’y aura pas d’excellents prêtres à la tête des paroisses. Engagez donc tous les ecclésiastiques à être des saints; qu’ils lisent les vies de saint Charles et de saint Vincent de Paul; ils verront s’il est permis à un prêtre, à un pasteur de vivre dans la tiédeur et sans zèle. Je vous assure que je ne cesse de penser à vous et de remercier le bon Dieu du courage qu’il vous donne. J’espère que vous ferez beaucoup, parce que vous aimez sincèrement le bon Dieu et l’Église […]» [30].

Mais, toujours très impressionnable, surtout entre 1816 et 1818, alors qu’il travaillait trop et souffrait de divers malaises [31], Eugène dut ressentir vivement les critiques et les embûches que mettaient les curés d’Aix à son apostolat surtout auprès des jeunes [32]. Ses jugements à l’emporte-pièce contre les mauvais prêtres sont sans doute, pour une bonne part, une généralisation et une exagération de ceux qu’il porte sur le comportement des curés d’Aix. On en a la preuve dans quelques lettres adressées au père Henry Tempier en 1817. Le 12 août, par exemple, il écrivait: «Les prêtres vicieux ou méchants sont la grande plaie de l’Église. Faisons tous nos efforts pour adoucir ce chancre dévorant, en faisant bande à part, pour les sentiments et pour la conduite […]», et le 24 novembre: «Est-il possible que notre patience n’ait pas apaisé la colère de ces bons curés? Ce qui m’afflige uniquement, dans tout ceci, c’est que ces gens, dans des dispositions si contraires à la charité, ne s’abstiennent pas de monter à l’autel. […] Je les plains de tout mon cœur […]» [33]. «On reconnaît dans ses lettres des expressions qu’il reprend dans les articles des Règles et dans les paragraphes de la Préface sur la réforme du clergé.

3. PARAGRAPHE 3

Volonté généreuse de quelques prêtres

Le paragraphe 3 dépeint en une phrase ce qui caractérise le plus le Fondateur: son affection, son cœur, lui qui ne vivait «que par le cœur» [34] et d’où la Congrégation est «en quelque sorte toute sortie» [35]. En trois lignes, on a trois mots qui expriment cet aspect de sa personnalité: «a touché le cœur», «à qui la gloire de Dieu est chère», «qui aiment l’Église». Mais déjà en 1809 et en 1816, l’état d’abandon de l’Église avait «touché» et «ému» sa sensibilité (voir le tableau comparatif). Félicité de Lamennais lui-même était «vivement touché des maux de cette tendre mère». On était au temps du romantisme, toujours excessif dans la formulation des sentiments.

La trilogie: gloire de Dieu, amour de l’Église et salut des âmes qu’on retrouve, avec quelques variantes, trois fois dans la Préface, apparaît dans les écrits de Mgr de Mazenod depuis 1808 et on la retrouvera jusqu’à sa mort. On la rencontre également dans les écrits des Sulpiciens [36].

4. PARAGRAPHE 4

Œuvre réalisable

Dans le paragraphe quatre, le père Reslé souligne particulièrement l’optimisme: «Ils se sont convaincus..»., «on pourrait se flatter de ramener bientôt les peuples égarés à leurs devoirs…» [37].

Pourquoi cet optimisme? À cause de la force d’attraction et du bon exemple des hommes vertueux et apostoliques, en opposition aux vices des mauvais prêtres; à cause de la puissance de la Parole de Dieu (voir 1 Th 4, 16).

Les détails sur les vertus et le zèle des hommes apostoliques apparaissent dans le paragraphe 6. Les commentateurs des Règles s’arrêtent pourtant ici à quelques expressions plus significatives. Le père Léonard Leyendecker [38] remarque surtout que le désintéressement (en latin: non turpis lucri cupidi) est une vertu souvent mentionnée par saint Paul [39]. Le père Reslé [40] commente les mots «solidement vertueux» par une citation du bienheureux Antoine Chevrier (1826-1879), fondateur du Prado de Lyon: «Mettez un prêtre saint dans une église de bois, ouverte à tous les vents, il attirera et convertira plus de monde qu’un autre prêtre dans une église d’or. […] Et aujourd’hui cependant, on travaille beaucoup plus à faire de belles églises, de belles cures, qu’à faire des saints. C’est qu’il est plus facile de faire une belle église que de faire un saint. […] Ne faisons pas passer l’accessoire avant l’essentiel, les pierres avant la vertu, les ornements avant la sainteté […]» [41].

Mais l’expression que le père Drouart considère comme fondamentale ici est celle d’«hommes apostoliques», qui ne se trouve pas dans le paragraphe correspondant des Règles de 1818. Jean-Jacques Olier, Félicité de Lamennais et le Fondateur lui-même, avant 1825, emploient cette expression (voir le tableau comparatif).

Le père Drouart l’explique par le très beau texte du début du Nota bene de 1818, omis en 1825-1826, et qui est ainsi récupéré. Je cite quelques extraits de son texte: «Une phrase de la première rédaction de la Règle de 1818 me semble synthétiser toute la pensée spirituelle du Fondateur au moment de la fondation: «Quelle fin plus sublime que celle de leur Institut? Leur instituteur c’est Jésus Christ, le Fils de Dieu lui-même; leurs premiers Pères les Apôtres. Ils sont appelés à être les coopérateurs du Sauveur, les corédempteurs du genre humain; et quoique, vu leur petit nombre actuel et les besoins plus pressants des peuples qui les entourent, ils doivent pour le moment borner leur zèle aux pauvres de nos campagnes et le reste, leur ambition doit embrasser, dans ses saints désirs l’immense étendue de la terre entière».

«Là se trouve la définition de l’homme apostolique dans la perspective du mystère du salut: sa relation personnelle au Christ comme les Apôtres et, au-delà du territoire où s’exerce sa mission, sa relation au monde et à l’Église.

«Le Fondateur voyait dans les Apôtres, nos «premiers Pères» (C et R de 1928, art. 287), nos «modèles» (art. 288). Il les définit dans la Préface, des hommes choisis par le Christ, formés par lui, remplis par lui de son Esprit et envoyés par lui pour annoncer le salut au monde entier.

«Au centre de tout, le Fondateur voit le mystère du salut qui se continue par l’Église. […] On peut dire que sa spiritualité apostolique part des premiers chapitres de la première épître aux Corinthiens dans lesquels, comme d’ailleurs dans la seconde, saint Paul situe la vocation apostolique dans le prolongement du mystère de la croix […].

«Coopération avec le Sauveur, c’est là la source de toutes les exigences de la vocation apostolique. Prêcher à la façon de l’Apôtre Christum, et hunc crucifixum, non in sublimitate sermonis, sed in ostensione spiritus (1 Co 2, 1, 2, 4), ce n’est pas simplement en parler, mais c’est s’en être pénétré profondément et en vivre (art. 98). Le ministère de l’Oblat n’est vraiment fructueux que dans la mesure où il porte en son corps les souffrances de la mort de Jésus (2 Co 4, 10); c’est pourquoi il met sa gloire dans les faiblesses, les outrages, les persécutions, les angoisses endurées pour le Christ (2 Co 12, 10). C’est là tout l’article 263; c’est-à-dire que cette coopération n’engage pas simplement nos activités, mais l’être profond tout entier […]» [42].

Le père Jetté écrit de son côté: «L’homme apostolique, ou le missionnaire, dans la pensée du Fondateur, est un prêtre animé de l’esprit de Jésus Christ, plus spécialement de l’esprit des Apôtres, et qui marche sur leurs traces. Après avoir entendu l’appel de Jésus, il a tout quitté pour le suivre, être son compagnon, vivre de sa vie, et pour être envoyé par lui dans le monde — il n’est pas sédentaire — afin d’y annoncer la Bonne Nouvelle du salut. Dans l’homme apostolique, on trouve toujours deux éléments, inséparables l’un de l’autre: la ferveur spirituelle et le zèle missionnaire. Le second ne suffit pas; il faut aussi le premier. Et dans cette Préface, pour les Oblats, comme personnes et Société, les deux sont présents […]» [43].

5. PARAGRAPHE 5

Le Christ

Le père Jean-Marie-Rodrigue Villeneuve écrivait en 1929: «On voit que, conformément à la doctrine, c’est le Christ qui est l’objet avant tout de [la pensée du Fondateur]; le Christ, notre Sauveur, et l’Église qui en est le noble héritage acquis au prix de son sang» [44].

Au sujet du Christ, le père Jetté fait la réflexion suivante: «Une société d’hommes apostoliques ne peut vivre sans règles, […] la première règle pour nous, c’est Jésus Christ […]» [45].

Mais, ici encore, c’est surtout le père Drouart qui approfondit les paragraphes 5 et 6 en les commentant à la lumière de divers articles des Règles. «Nous atteignons ici, note-t-il, le cœur de la spiritualité apostolique du Fondateur. La personne même vivante du Christ Sauveur dont nous ne serons vraiment les coopérateurs que dans la mesure où nous l’imiterons en tout (C et R de 1928, art. 287), pour autant que le permet l’humaine faiblesse, mettant nos pas dans ses traces; la fin de la Congrégation est de prêcher l’Évangile aux pauvres en imitant assidûment les vertus et les exemples du Christ Sauveur (art. 1) […]. D’où il ressort qu’il ne s’agit pas pour le Fondateur simplement d’une imitation extérieure, d’un pur «mimétisme» mais bien d’une profonde transformation intérieure du moi. La formation sacerdotale consiste à “former le Christ” en nous (art. 62); en somme, la “sequela Christi” sur laquelle insiste le décret Perfectæ Caritatis.

«Et — ceci me paraît capital — pour le Fondateur, cette transformation intérieure n’est pas le seul fait d’une contemplation coupée de l’action, mais elle s’opère tout à la fois et dans la contemplation et dans l’action. Bien sûr, le but de la contemplation du Sauveur est de nous amener “à reproduire en nous, au vif, ses vertus” (art. 254); mais il ne s’agit pas d’une contemplation coupée de l’action et encore moins opposée à elle. Cela ressort clairement de tout l’ensemble de la Règle, mais était dit explicitement à l’article 290 qui faisait la synthèse entre les deux parties d’une seule et même vie qui ne sont pas opposées entre elles: “Mais aussi bien à l’intérieur de la maison […] que dans les missions, […] leur principal souci sera de devenir d’autres Jésus Christ” [46]. En d’autres termes, le ministère apostolique, s’il est vraiment “coopération avec le Sauveur” nous unit, nous identifie à lui […]» [47].

6. PARAGRAPHE 6

Que devons-nous faire? Devenir des saints

Le Fondateur décrit ici ce qu’est l’homme apostolique. Il faut noter en passant que, dans la Préface, il n’est pas question une seule fois explicitement de la vie religieuse.

Le paragraphe commence par l’énumération des dispositions et des vertus personnelles, selon trois degrés: 1. travailler sérieusement à devenir des saints; 2. renoncer entièrement à soi-même; 3. se renouveler sans cesse.

Monsieur Olier parle à peu près des mêmes conditions: anéantissement ou dépouillement et renouvellement (voir le tableau comparatif).

À cela le Fondateur ajoute une longue liste de vertus, allant des moindres aux plus importantes: humilité et douceur comme chez monsieur Tronson (voir le tableau comparatif), vertus de l’état religieux et enfin amour de Dieu et du prochain.

Le paragraphe continue et se termine par le zèle jusqu’au don total de soi et par la confiance en Dieu. «C’est seulement après avoir revêtu ses missionnaires, comme de pied en cap, écrit le père Yenveux, de cette solide armure des vertus, que Mgr de Mazenod consent à leur dire: ensuite pleins de confiance […]» [48]. Donc confiance en la puissance de Dieu, mais après avoir coopéré généreusement, combattu jusqu’à extinction, sacrifié biens, talents, repos et sa propre personne pour l’amour de Jésus Christ, le service de l’Église et le salut du prochain.

Monsieur Tronson a un texte à peu près semblable (voir le tableau comparatif). Le Fondateur tient beaucoup à ce don total. Avec ses adverbes et ses adjectifs successifs, le paragraphe 6 exprime on ne peut mieux cette exigence de l’absolu dans le don: «travailler sérieusement […] marcher courageusement […] renoncer entièrement […] avoir uniquement en vue la gloire de Dieu […] se renouveler sans cesse […] volonté constante […] en travaillant sans relâche […] prêts à tout sacrifier […] à combattre jusqu’à extinction». Déjà au paragraphe 3, on lisait: «qui voudraient se sacrifier, s’il le fallait, pour le salut des âmes».

Le père Villeneuve conclut cette partie par ces mots: «Ainsi notre mystique: contempler le Christ; ainsi notre ascétisme: reproduire ses vertus; et ainsi remplir notre rôle sacerdotal et apostolique: le salut des âmes» [49].

7. PARAGRAPHE 7

Action sacerdotale et apostolique

«Ce paragraphe, écrit le père Yenveux, trace en traits saisissants le champ immense ouvert au zèle des missionnaires» [50]. Le père Blanchard, pourtant philosophe, devient ici poète. Il s’exprime ainsi: «Quel champ immense s’ouvre devant eux! Quelle grande et sainte entreprise! Ces mots rendent le même son que ceux échappés de la poitrine de l’alpiniste, devant le panorama où plonge sa vue, du sommet élevé qu’il vient d’atteindre. N’est-ce pas généralement de la cime de la perfection qu’il vient d’atteindre que l’Oblat tourne ses yeux vers la plaine qu’il a quittée et qu’il contemple comme le champ de son apostolat futur? La tâche qui auparavant l’effrayait lui apparaît maintenant, de la hauteur qu’il occupe, dans ses justes proportions, lesquelles, pour être encore immenses, ne sont plus exagérées. Le premier tableau qui frappe la vue est celui de la plus honteuse ignorance […]» [51].

L’Oblat doit combattre l’ignorance en matière de foi en enseignant qui est le Christ, la corruption des mœurs en mettant en honneur et faisant pratiquer toutes sortes de vertus. Enfin, il doit «mettre tout en œuvre» pour substituer l’empire du démon par l’empire du Christ. Ce travail doit s’effectuer par étapes: d’abord faire des hommes raisonnables, ensuite des chrétiens et, enfin, des saints.

En ce sens, ce paragraphe reprend en partie ce qui est dit sur l’état de l’Église et sur l’importance d’annoncer la Parole de Dieu. Ces idées se retrouvent chez Jean-Jacques Olier, Félicité de Lamennais et Eugène de Mazenod avant 1818 (voir le tableau comparatif).

8. PARAGRAPHE 8

En société [en communauté]

Cette action sacerdotale et apostolique, les Oblats l’exercent en société, «viribus unitis». Il y aurait beaucoup à dire à ce sujet. Dans sa visite canonique au Zaïre, le père Drouart consacre quelques pages à cela [52]. Les actes du congrès de l’Association d’études et de recherches oblates, en août 1989, à Ottawa, sur La mission en communauté apostolique ont été publiés dans Vie Oblate Life, en 1990. Le père Domenico Arena, missionnaire au Sénégal, a écrit une importante thèse en missiologie intitulée «Unité et mission». Elle est pratiquement un vaste commentaire du «viribus unitis». On trouve également dans Vie Oblate Life plusieurs articles sur la communauté oblate, en particulier ceux des pères Marcello Zago et Fabio Ciardi [53].

9. PARAGRAPHES 9 ET 10

Les Règles

Les paragraphes 9 et 10 démontrent enfin que l’action apostolique des Oblats s’exerce sous une règle et une discipline communes. Des centaines de fois, dans sa correspondance, le Fondateur exhorte les Oblats à la régularité au point où, surtout à partir du père Joseph Fabre, il a existé dans la Congrégation une espèce de divorce entre vie religieuse «régulière» et vie apostolique. Le père Reslé et surtout le père Drouart consacrent quelques pages de leurs commentaires pour expliquer comment ce divorce, dans la pensée du Fondateur et dans le texte même des Règles, n’existait pas [54].

LES SUPÉRIEURS GÉNÉRAUX

Les supérieurs généraux ont tous mentionné la Préface de la Règle dans leurs lettres circulaires [55]. Il s’agit habituellement d’une brève citation de la Préface, à la suite de laquelle ils rappellent le sens et l’obligation de quelques articles de la Règle, par exemple sur l’Église, la sanctification personnelle et les vertus, la vie religieuse, le Christ, le zèle, les urgences, la communauté, etc.

C’est cependant le père Léo Deschâtelets, supérieur général de 1947 à 1972, qui a le plus souvent parlé de la Règle et, en particulier de la Préface [56]. Il l’a appelée le «résumé de la Règle aux aspects éblouissants comme les facettes d’un diamant» [57] ou, encore, «l’acte de naissance de notre Institut: elle le situe dans l’Église. En traits de feu, elle décrit la figure de l’Oblat, homme apostolique avant tout, destiné à soulager, selon ses humbles moyens, la détresse de l’Église, épouse bien-aimée du Christ, Sauveur du monde » [58]. Dans les premières pages de la lettre circulaire du 15 août 1951, sur Notre vocation et notre vie d’union intime avec Marie Immaculée [59], il commente la plupart des paragraphes de laPréface, en particulier sur l’Oblat prêtre, religieux, missionnaire, brûlant d’amour pour Jésus, etc.

Dans le commentaire que nous avons fait ici de chacun des paragraphes de la Préface, nous n’avons pas cité d’extraits de cette lettre circulaire du père Deschâtelets parce que tout ce qu’elle contient mérite d’être connu et lu. Il avait le même tempérament de feu que celui du Fondateur; il connaissait très bien ses écrits et a su transmettre avec le même élan sa pensée et son charisme.

CONCLUSION

Je termine ces quelques réflexions par les dernières lignes du commentaire de la Règle du père Jetté: la Préface est une bonne introduction aux Constitutions et Règles, «mais elle est surtout une invitation à l’absolu dans le don de soi-même à Jésus Christ et à l’Église. L’Oblat peut devenir un homme de prière, un homme pour les autres, un pauvre selon l’Évangile, un témoin de la foi,… mais pour le devenir, il devra s’engager complètement. On ne le devient pas, si l’on n’est pas d’abord homme de Jésus Christ et homme de l’Église. Notre vocation prend tout. C’est la principale leçon de la Préface» [60].

Yvon Beaudoin