1. Missionnaire des Amérindiens du Témiscamingue et de l’Abitibi
  2. Voyage en France (1850-1851)
  3. Maladie du père Laverlochère (1851-1884)

Naissance à Saint-Georges d’Espé­ranche (Isère), le 5 décembre 1812
Prise d’habit comme frère, à Marseille, le 26 novembre 1836
Oblation au début de 1838
Prise d’habit comme scolastique, à Marseille, le 31 octobre 1840
Oblation à N.-D. de Lumières, le 1er novembre 1841 (no 90)
Ordination sacerdotale à L’Acadie, Canada, le 5 mai 1844
Décès à Témiscamingue, le 4 octobre 1884.

Jean Nicolas Laverlochère est né à Saint-Georges d’Espéranche, diocèse de Grenoble, France, le 5 décembre 1812, septième enfant de Jeoffroi La Verlochère et d’Anne Linage. L’enfant abandonna assez tôt l’école et apprit le métier de cordonnier. Il connut les Oblats, semble-t-il, en 1835, lors d’une mission prêchée dans son village par le père Vincens et les pères de Notre-Dame de l’Osier. Il décida de devenir frère et commença le noviciat à Marseille le 26 novembre 1836. Il prononça ses vœux au début de 1838.

Envoyé à la maison d’Aix comme sacristain, il obtint bientôt du père Cour­tès et de Mgr de Mazenod la permission d’étudier un peu de latin afin de devenir prêtre. Il demeura pendant quelque temps à Saint-Barnabé, banlieue de Marseille, chez le curé Jean Joseph Audric qui, dans son presbytère, éduquait des jeunes gens destinés au sacerdoce. Le 1er mars 1844, Mgr de Mazenod écrivit au père Honorat que le frère Laverlochère a fait «des études tronquées et absolument insuffisantes».

Le 31 octobre 1840 il recommença le noviciat à Marseille, et fit son oblation à Notre-Dame de Lumières, le 1er novembre 1841. Pendant son noviciat, il fit un peu de philosophie au grand séminaire de Marseille et étudia ensuite la théologie avec un père à Notre-Dame de Lumières et à Notre-Dame de l’Osier. Le Fondateur l’ordonna diacre, le 20 août 1843 et le fit aussitôt partir pour le Canada avec le père Adrien Telmon qui rentrait au Canada après le Chapitre général.

Missionnaire des Amérindiens du Témiscamingue et de l’Abitibi
Arrivé à Longueuil le 12 octobre 1843, le frère continua l’étude de la théo­logie et commença à apprendre la langue algonquine. À la demande de Mgr Joseph Signay de Québec, le père Honorat dési­rait l’envoyer au plus tôt auprès des Amérindiens. Le père Allard le prépara à l’ordination et il fut ordonné prêtre dans l’église de l’Acadie, le 5 mai 1844, par Mgr Rémi Gaulin, évêque de Kingston.

Dès le 14 mai, le père Laverlochère accompagna l’abbé H. Moreau dans un voyage de trois mois sur la rivière Outa­ouais. Avec l’aide de six rameurs, ils passèrent à Fort William et à Fort Témis­camingue pour atteindre le lac Abitibi le 27 juillet et rentrer à Ottawa le 24 août. Ils s’arrêtèrent quelques jours à chaque endroit pour prêcher et confesser les Amérindiens. Au cours de l’hiver 1844-1845, le père résida chez les Sulpiciens du lac des Deux-Montagnes pour continuer à apprendre la langue algonquine.

À partir de 1845, c’est lui-même qui fut chef de mission et fit le même trajet qu’en 1844 avec le père André-Marie Garin en 1845 et 1847, le père Thomas-Hercule Clément en 1846 et 1848, le père Charles Arnaud en 1849, l’abbé Perret en 1850 et le père Antoine Paillier en 1851. De 1848 à 1851, les missionnaires se rendirent jusqu’à la Baie James, à Moose Factory dès 1847 et à Fort Albany à partir de 1848.

Le père Laverlochère était très aimé des Amérindiens et se lia d’amitié avec les bourgeois de la Compagnie de la Baie d’Hudson dans les divers forts. Il entretint également de bonnes relations avec Sir George Simpson, gouverneur de la Compagnie qui résidait à Lachine près de Montréal. De 1847 à 1851, le père voulut établir une mission catholique permanente à Fort Albany, mais le gouverneur ne le permit pas à cause, disait-il, du manque de moyens et de vivres dans cette région éloignée.

Voyage en France (1850-1851)
Au cours de l’hiver, de 1845 à 1849, le père Laverlochère aidait les pères de Longueuil dans la prédication et quêta avec succès en faveur des missions des diocèses de Québec et de Montréal. Il fut également connu en France par la publica­tion de quelques-unes de ses lettres dans les Annales de la Propagation de la foi. Mgr de Mazenod l’appela en France afin de prêcher en faveur de l’œuvre. Au mois d’août 1850, le père prit le bateau à Moose Factory, s’arrêta quelque temps en Angleterre et commença à prêcher d’abord dans le Midi. Ses succès dépassèrent l’attente générale. Les églises se rem­plirent partout: à Marseille, Aix, Nîmes, Avignon, Toulon, puis ensuite à Grenoble, Lyon, Nancy, Paris, etc. Dans ses lettres, à l’automne et pendant l’hiver 1850-1851, Mgr de Mazenod ne cesse de dire son émerveillement et sa joie. Il écrit par exemple à Mgr Guigues, le 10 janvier 1851: «Tu ne saurais croire le succès qu’a eu ici, à Aix et à Toulon, ce bon père Laverlochère. C’est à en bénir Dieu. Nous avions entendu ici tous les évêques des missions qui parcouraient la France. Aucun d’eux, sans en excepter Mgr Flaget, n’a produit un pareil effet. C’est qu’il y a quelque chose de divin dans la simplicité de cet homme de Dieu! On voyait en lui, au dire du doyen de la faculté de théologie d’Aix, la personnification du divin apostolat chrétien…» Il prêcha au Havre à la mi-mars 1851, avant de reprendre le bateau pour le Canada.

Maladie du père Laverlochère (1851-1884)
Au début de mois de mai 1851, le père repartit pour la visite des missions le long de l’Outaouais et jusqu’à la Baie James. Au retour en automne, dans le Grand Portage, l’un des plus revêches, entre Moose Factory et l’Abitibi, il s’enroula un soir dans sa couverture sur le sol froid. Il fut frappé de paralysie au cours de la nuit. On dut le transporter de peine et de misère jusqu’à Ottawa à plus de 600 milles.

Le père André-Marie Garin, qui lui succéda dans les missions de la Baie James, parla de «perte irréparable». Le père Laverlochère a été le premier Oblat missionnaire des Amérindiens au Canada. Il avait les qualités physiques et morales propres à cette œuvre, lisons-nous dans sa notice nécrologique: «Taille avantageuse, physionomie avenante, tempérament sain, esprit vif, bon cœur, énergie peu com­mune, entrain…»

Il entra à l’hôpital des Sœurs Grises d’Ottawa le 15 octobre 1851. Mère Bruyère avoua qu’il avait la figure un peu décomposée et le côté un peu engourdi. On l’a mis au repos absolu pendant une quinzaine de mois. Il se remit suffisam­ment pour continuer à célébrer la messe, entendre les confessions et même prêcher dans les diverses maisons où il a été envoyé.

On l’avait redemandé en France dès 1851 pour prêcher encore en faveur de l’œuvre de la propagation de la foi. Il revint du printemps 1853 jusqu’au début 1856, mais ce fut surtout pour se soigner. Il donna quelques conférences au cours de l’été 1854 et au printemps 1855, mais Mgr de Mazenod annonça aux responsa­bles de l’œuvre que l’état du père ne lui permettait plus de continuer: «Je l’ai donc prié de suspendre totalement ses prédi­cations qui ne sauraient produire les résultats désirés» (Le 15 avril 1855).

De retour au Canada en janvier 1856, le père Laverlochère fut de résidence à Maniwaki de 1856 à 1863, à Sault Saint-Louis (Kahnawake) pendant quelques mois à l’été 1863, à Plattsburgh de 1863 à 1867 et à Témiscamingue de 1868 à sa mort, survenue le 4 octobre 1884. À la fin de sa vie, il souffrait de rhumatisme et avait des plaies de lit sur tout le corps. Il accepta toujours avec résignation sa mala­die et ses souffrances. Il est inhumé dans le cimetière amérindien du Vieux Fort-Témiscamingue. Un monument lui a été élevé à Témiscamingue et l’endroit a été déclaré site historique par la province d’Ontario. Un canton, une rivière et un village de la province de Québec perpé­tuent sa mémoire.

Yvon Beaudoin
et Gaston Carrière, o.m.i.