L’Univers fut un quotidien catholique fondé en 1833 par l’abbé J. P. Migne, continué par une société dirigée par Emmanuel Bailly, puis en 1843 par Louis Veuillot. Polémiste et écrivain de talent, partisan à outrance de la politique de Pie IX, Veuillot fit de L’Univers un journal catholique très influent malgré un tirage limité. En 1879, la direction du journal passa à Eugène Veuillot, frère de Louis. La parution du journal cessa en 1914.

Mgr de Mazenod parla quelquefois de L’Univers et intervint deux fois dans les polémiques suscitées par le journal. En 1851, J. Gaume publia un livre intitulé: Le ver rongeur des sociétés modernes ou le paganisme dans l’éducation. Il soutenait d’une façon simpliste que la déchristianisation de la société était due aux auteurs païens qu’on enseignait dans les écoles. Mgr Dupanloup, évêque d’Orléans et éducateur renommé, écrivit aux professeurs de ses séminaires pour défendre l’enseignement traditionnel contre les thèses de Gaume. L’Universpublia alors un article cinglant de Veuillot contre Mgr Dupanloup accusé d’instituer dans ses séminaires un système d’éducation dont le paganisme formait la base. Mgr de Mazenod, qui eut toujours à cœur l’honneur de l’épiscopat, fut attristé par l’attaque de Veuillot et, le 15 juin 1852, écrivit à Mgr Dupanloup pour lui exprimer sa sympathie et affirmer son adhésion au système traditionnel de l’enseignement dans les écoles catholiques.

Mgr de Mazenod intervint de nouveau en 1853. Au début de l’année, l’abbé Gaduel, natif du diocèse de Marseille et vicaire général d’Orléans, publia dans L’Ami de la religion une série d’articles dans lesquels il critiquait un ouvrage de Donoso Cortès: Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme. Ces articles attirèrent la réplique mordante et ironique de Louis Veuillot. Mgr Guibert adressa alors à son clergé, le 2 février 1853, une lettre circulaire sur les mérites et les excès de L’Univers. Le 26 février, Mgr de Mazenod félicita l’évêque de Viviers, en l’assurant qu’il partageait ses idées. Dans cette lettre, l’évêque de Marseille louait l’esprit romain et l’attachement au Pape de L’Univers mais en désapprouvait le ton sarcastique et irrespectueux envers le sacerdoce. Le 10 mars, il envoya une copie de cette lettre au cardinal Antonelli, secrétaire d’État. Le 21 mars 1853, le pape Pie IX fit paraître l’encyclique Inter multiplices sur les disputes soulevées surtout par L’Univers. Le Pape disait entre autres que l’usage des classiques était irremplaçable pour la culture; il ajoutait qu’il fallait reprendre mais non condamner les journalistes catholiques. Dans un éditorial de L’Univers, le 10 avril 1853, les rédacteurs du journal promettaient plus de modération et de charité. Le 11 avril, Mgr de Mazenod s’empressa de leur exprimer sa satisfaction.

Le Fondateur continua à recevoir le journal, à le lire et à y envoyer des articles, en particulier une lettre circulaire de Mgr Chatrousse sur les Oblats au séminaire de Romans (lettre au père Bellon, le 25 octobre 1853) et des articles du père de L’Hermite sur Notre-Dame de Cléry, en 1858 et 1859. Dans une lettre au père de L’Hermite, le 5 octobre 1858, il demanda que, par économie, les Oblats ne s’abonnent qu’à l’édition semi-quotidienne mais, ajoutait-il «je ne considère pas moins ce journal, malgré les torts que je lui ai reprochés publiquement quand il l’a fallu, comme utile à la religion dont il défend bien la cause».

Yvon Beaudoin, o.m.i.