1. La pensée du fondateur
  2. Qui sont les pauvres pour eugène de mazenod?
  3. Les pauvres dans les écrits oblats plus récents
  4. Conclusion

«Evangelizare pauperibus misit me… pauperes evangelizantur (Il m’a envoyé évangéliser les pauvres – Les pauvres sont évangélisés)» Cette citation de Luc 4, 18 est la devise des Oblats. Elle résume en une phrase le motif qui a conduit Eugène de Mazenod à choisir la prêtrise et à fonder, dans la Provence de 1816, une société de missionnaires. L’expression qui traduit le mieux le caractère spécifique de l’Oblat est celle de missionnaire des pauvres. Ils constituent le but privilégié de l’action missionnaire et de la pastorale de l’Oblat. Ce qui le caractérise d’une façon spécifique c’est l’évangélisation des pauvres, non pas parce qu’ils sont pauvres, mais parce qu’ils sont abandonnés. Telle était la conviction de saint Eugène, telle est celle qu’ont gardée les Oblats jusqu’à ce jour.

LA PENSÉE DU FONDATEUR

À l’origine même de la vocation sacerdotale d’Eugène de Mazenod, il y a la certitude d’être envoyé aux pauvres. Lorsqu’il fait part à sa mère, en 1808, de sa décision d’entrer au séminaire, il lui écrit: «J’en atteste le Seigneur. Ce qu’il veut de moi […] c’est que je me dévoue plus spécialement à son service pour tâcher de ranimer la foi qui s’éteint parmi les pauvres» [1].

Séminariste à Saint-Sulpice, on le charge d’enseigner le catéchisme à certains des enfants les plus pauvres de la paroisse, une tâche qui correspond totalement à ses goûts. Nous retrouvons sa pensée sur le sujet dans une autre lettre à sa mère: «Ce sont les plus pauvres de la paroisse […] mais je ne m’en soucie pas et suis très content de me trouver au milieu de ces pauvres pouilleux, que je tâcherai de ramener auprès de nous» [2].

À l’été de 1810, il est empêché de retourner en Provence pour les vacances d’été; il regrette de manquer l’occasion d’instruire les pauvres de Saint-Julien, où vit sa grand-mère: «Je m’étais proposé d’aller voir grand-maman à Saint Julien et je me proposais d’instruire un peu ces pauvres peuples si abandonnés. Je me plaisais déjà dans l’idée du fruit que ces instructions pourraient produire. Pauvres chrétiens qui n’ont pas la moindre idée de leur dignité, faute d’avoir rencontré qui leur rompe le pain de la parole» [3].

QUI SONT LES PAUVRES POUR EUGÈNE DE MAZENOD?

Dans la dernière citation de la lettre d’Eugène à sa mère en juillet 1810, nous voyons réunis les expressions «pauvres peuples» «abandonnés». Elles reviennent régulièrement dans ses écrits, mais plus souvent «les abandonnés» que «les pauvres». Il les utilise parfois d’une façon presque équivalente même si la dernière a un point de vue plus large que la première. L’idée fondamentale qui sous-tend toutes ces affirmations semble être l’état d’abandon de l’Église qui se manifeste surtout dans certaines catégories de chrétiens, à savoir les pauvres [4].

En revenant à Aix en 1812, nouvellement ordonné prêtre, il se préoccupe au plus haut point de cette situation déplorable. Il demande à son évêque de ne pas lui assigner de paroisse, mais de le laisser libre de se dévouer «au service des pauvres et de l’enfance» [5]. Il commence son ministère en visitant les prisons, les malades et en s’occupant des jeunes d’Aix.

Pendant le carême de 1813, on le trouve à prêcher tôt le matin dans l’église de la Madeleine pour les serviteurs et les domestiques. Le choix de cet auditoire est digne de remarque; dans les notes qu’il écrit à cette occasion, il fait une liste de ces pauvres: «Il y aura, pendant ce saint temps, de nombreuses instructions pour les riches, pour ceux qui ont reçu une éducation. N’y en aura-t-il point pour les pauvres et les ignorants? […] Les pauvres, portion précieuse de la famille chrétienne, ne peuvent être abandonnés à leur ignorance» [6].

Le texte de cette instruction de carême, qui est l’un des premiers que nous ayons de sa prédication, fait appel aux «artisans», «domestiques», «cultivateurs», «paysans», «indigents obligés de mendier leur subsistance».

Au sommet de cette envolée, sa voix sonore a certainement résonné sous la voûte de la Madeleine et remué le cœur de ses auditeurs: «Pauvres de Jésus Christ, affligés, malheureux, souffrants, infirmes, couverts d’ulcères, etc., vous tous que la misère accable, mes frères, mes chers frères, mes respectables frères, écoutez-moi. Vous êtes les enfants de Dieu, les frères de Jésus Christ, les cohéritiers de son Royaume éternel […]» [7].

Aujourd’hui, nous dirions qu’il a opté pour les marginaux, ceux que l’Église rejoint le moins dans la société, littéralement les abandonnés. Il les a choisis comme but de son ministère non pour quelque motif humaniste, ni en premier lieu parce qu’ils étaient matériellement pauvres, mais surtout parce qu’ils étaient abandonnés. Selon l’exemple et dans l’esprit de Jésus Christ, il a reconnu aux pauvres et aux abandonnés le droit d’entendre l’Évangile du salut. Le jeune prédicateur de la Madeleine le dit clairement au début de son instruction: «Les pauvres, portion précieuse de la famille chrétienne, ne peuvent être abandonnés à leur ignorance. Notre Divin Sauveur en faisait tant de cas qu’il se chargeait lui-même du soin de les instruire, et il donna pour preuve que sa mission était divine que les pauvres étaient enseignés: Pauperes evangelizantur» [8].

Tel a été le choix personnel qu’il a fait au début de son ministère; tel a été le but qu’il s’est fixé en fondant la société des missionnaires de Provence, comme nous le lisons dans ses notes de retraite de 1831: «En aurons-nous jamais une juste idée de cette sublime vocation! Il faudrait pour cela comprendre l’excellence de la fin de notre Institut, incontestablement la plus parfaite que l’on puisse se proposer ici-bas, puisque la fin de notre Institut est la même que la fin qu’a eue le Fils de Dieu en venant sur la terre. La gloire de son Père et le salut des âmes […]. Il a particulièrement été envoyé pour évangéliser les pauvres: Evangelizare pauperibus misit me. Et nous sommes établis précisément pour travailler à la conversion des âmes et spécialement pour évangéliser les pauvres […]» [9].

L’évangélisation des pauvres et des abandonnés est le mobile qui conduira Eugène de Mazenod et son équipe de prédicateurs dans les campagnes et les villages plus pauvres de Provence et finalement dans les coins les plus reculés de la terre. Dans ses écrits nous trouvons diverses expressions qui décrivent les buts préférés de son ministère: «pauvre», «le petit peuple», «le peuple sans culture», «tous ceux de la campagne», «ceux qui dans les villes languissent dans la détresse spirituelle»; dans les missions étrangères, ce sont les «infidèles», les «hérétiques», les «prisonniers», les «mourants», en d’autres mots «les âmes les plus abandonnées». Le mot abandonné se rapporte d’une façon particulière à la détresse spirituelle. Cette pauvreté spirituelle s’incarne néanmoins «dans une pauvreté de l’ordre naturel» [10]. Au temps du Fondateur, les plus abandonnés spirituellement vivaient, en fait, dans la détresse matérielle. Les deux mots reviennent volontiers indifféremment sous sa plume. Cependant, comme le remarque Émilien Lamirande, l’idée sous-jacente semble être la notion d’abandon: «Il nous semble d’abord que l’idée d’abandon est la plus fondamentale. Le Fondateur a été ému de la détresse de l’Église et des âmes. Ceux qui sont les plus dépourvus de secours spirituels, ce sont les pauvres, les petites gens, c’est donc à eux que s’adressera d’abord la Congrégation. Elle sera avant tout attentive à la détresse spirituelle, mais se rappellera toujours que les déshérités de toutes catégories ont un droit préférentiel à sa sollicitude» [11].

L’inspiration première du Fondateur se trouve codifiée dans les deux premiers articles des Constitutions et Règles de 1818: «principalement en s’employant à prêcher aux pauvres la parole divine». L’article 2 décrit ceux que vise cette prédication: «procurer des secours spirituels aux pauvres gens épars dans les campagnes et aux habitants des petits pays ruraux plus dépourvus de ces secours spirituels».

LES PAUVRES DANS LES ÉCRITS OBLATS PLUS RÉCENTS

Au fur et à mesure que la Congrégation a grandi et s’est étendue, ses membres, fidèles à l’esprit de leur Fondateur, se sont engagés dans «toutes les œuvres de zèle que la charité sacerdotale peut inspirer» (Préface); ils se sont toujours rappelé qu’ils étaient d’abord des «missionnaires des pauvres» et des plus abandonnés. L’histoire des Oblats, cependant, ne cache pas le fait qu’ils ont eu, selon les époques et les endroits, du mal à définir les termes; ils ont été aux prises avec la question de savoir qui des gens matériellement ou spirituellement pauvres avaient la priorité. On a souvent eu tendance à unir les deux termes pauvres et abandonnés sans se faire de scrupule. Le successeur immédiat du Fondateur, le père Joseph Fabre semble les prendre pour des synonymes: «Voilà la fin que nous a assignée notre vénéré Père. Nous devons évangéliser les pauvres, les âmes les plus abandonnées […]» [12].

En 1926, en pleine expansion de la Congrégation dans les missions étrangères, le père Émile Baijot, dans un bref commentaire sur la devise oblate, loue les Oblats missionnaires dans les régions éloignées en disant qu’ils sont de vrais «missionnaires des pauvres» [13].

Environ vingt ans plus tard, un article du père Marcel Bélanger nous permet de saisir les questions et les discussions qu’avaient les Oblats qui ne sont pas directement engagés auprès des personnes matériellement pauvres, c’est-à-dire ceux qui travaillent dans les œuvres d’éducation, les diverses aumôneries, les maisons de formation oblate et l’administration.

Le père Bélanger insiste sur l’aspect d’état d’abandon. Le pauvre qui fait l’objet de l’attention de l’Oblat n’est pas uniquement, ni «premièrement le miséreux, l’extrême indigent, le désemparé» [14]. Une telle interprétation, soutient-il, s’éloignerait du texte et de la conduite du Fondateur. C’est, insiste-t-il, «la détresse spirituelle du pauvre, le problème bien particulier de nos masses travailleuses [qui] nous paraissent devoir être la préoccupation dominante chez tout Oblat, l’esprit définitivement caractéristique de la vocation oblate» [15].

Compris de cette façon, les pauvres avec leurs problèmes demeureront toujours une question de conscience pour l’Oblat. Quel que soit son champ d’apostolat, c’est le «sens du pauvre» qui l’occupera, qui donnera à son apostolat un caractère particulier, comme un pôle magnétique qui attire, une fin supérieure qui détermine et crée un état d’esprit et un comportement.

Un tel examen de conscience ou remise en question ne résout pas le dilemme, ni le débat sur la primauté de la pauvreté matérielle sur la pauvreté spirituelle. Cela révèle, cependant, le désir sincère de l’Oblat de demeurer fidèle à l’esprit du Fondateur et à l’article premier des Constitutions et Règles: «principalement en s’employant à prêcher aux pauvres la parole divine».

1. LES CONSTITUTIONS ET RÈGLES DE 1966

En 1966, un peu plus de cent ans après la mort du Fondateur, nous sommes bien loin de la première petite équipe de missionnaires qui prêchaient des missions dans les campagnes pauvres de Provence. Plus de sept mille Oblats couvrent tous les continents et exercent divers ministères. L’intérêt pour les missions paroissiales décroît en raison des nouvelles réalités sociales. La Congrégation réunie en Chapitre général partage les préoccupations de l’Église que reflètent Gaudium et Spes et les autres documents du second concile du Vatican.

L’esprit du Concile et sa préoccupation pour le phénomène grandissant de la pauvreté à l’échelle du monde n’est pas resté sans effet sur les Oblats. On le constate par les nombreuses références mises dans les marges du texte ad experimentum des Constitutions et Règles.

Le texte révisé de 1966 conserve la formulation de 1818 sur la fin de la Congrégation: «se consacrent principalement à l’évangélisation des pauvres» (C 1). On notera qu’à travers les diverses révisions du texte, l’expression du début n’a pas changé. Celle de 1928 avait ajouté les infidèles et les hérétiques à la liste des gens à qui procurer les secours spirituels (art. 2). Le Chapitre général de 1966 reprend en langage moderne l’article 2 de 1818 et sa version amendée de 1926: «Son premier devoir est d’aller au secours des plus délaissés» (C 3) [16]. Il regroupe «les plus délaissés» en deux catégories: «la Congrégation porte l’Évangile aux peuples qui ne l’ont pas encore reçu et, là où l’Église est déjà implantée, aux groupes humains et aux régions les plus éloignés d’elle» (C 3).

La constitution 3 se termine par l’affirmation que la Congrégation se tient prête «à répondre aux urgences du monde et de l’Église». La constitution 4 précise cependant que «le monde des pauvres, ceux qui souffrent de la faim ou de l’insécurité» fait l’objet d’une «particulière prédilection» des Oblats; elle encourage ceux-ci à s’efforcer «d’être présents de multiples manières partout où de fait se prépare, s’élabore, se joue l’avenir de ce monde des pauvres».

Cet élément nouveau va au-delà de la vision du Fondateur, mais répond très bien aux soucis de l’Église de l’après-concile. Cette préoccupation deviendra encore plus explicite dans les années à venir et trouvera sa place dans la règle 9 du texte de 1982, qui dit que «le ministère pour la justice fait partie intégrante de l’évangélisation» [17].

2. LE CHAPITRE GENERAL DE 1972: LA VISEE MISSIONNAIRE

Les six années qui ont suivi le Chapitre de 1966 ont été marquées par de grands changements dans l’Église. Paul VI a lancé deux appels puissants à l’action: Populorum Progressio (1967) et Octogesima Adveniens (1971). Le mouvement de base suscité par la Conférence de Medellin (1968) a culminé dans la déclaration du troisième synode en novembre 1971: «La justice dans le monde». Le XXVIIIe Chapitre général s’est ouvert au printemps de 1972, six mois seulement après ce synode. Le document du Chapitre, La visée missionnaire, montre que les appels du Pape à l’action trouvaient réponse de tous côtés et que les mouvements dans l’Église avaient leur écho dans le cœur des Oblats.

L’objet spécifique de La visée missionnaire est de redéfinir en fonction de la réalité d’un monde nouveau la mission d’Eugène de Mazenod et de ses fils auprès «des plus abandonnés»: «En regardant le monde de son temps, Eugène de Mazenod voyait les hommes à peine atteints par le message du Christ. Poussé par sa foi, avec une confiance illimitée, il se mit au service des plus abandonnés […]” (n° 1).

La première partie, «Nous regardons le monde là où nous sommes», décrit la situation sociale qui évolue dans chaque région (nos 2-8). La situation varie d’un milieu socioculturel à l’autre. L’image qui s’en détache, cependant, est celle d’une exploitation politique et socio-économique, d’une situation lourde et chronique de pauvreté et de sous-développement, du nationalisme, du racisme, de la déshumanisation, des structures sociales sécularisées et de la violence. Chaque situation présente de nouveaux défis et exige de nouvelles façons d’évangéliser et d’être présent aux pauvres et aux abandonnés de notre temps.

La seconde partie signale certaines des nouvelles exigences de la mission que soulèvent ces défis. Dans certains endroits, ce sera de nouvelles formes d’apostolat, dans d’autres, une présence plus attentive aux injustices; dans d’autres encore, une solidarité très explicite avec les pauvres (n° 9). Le Chapitre réaffirme notre charisme fondamental d’annoncer l’Évangile aux pauvres. Il poursuit en disant «qu’il faut à chaque Province une orientation missionnaire définie, incluant une politique précise qui favorise la mission auprès des pauvres et le partage de vie avec eux» (n° 13 b). La situation d’ensemble du monde exerce une pression sur les masses matériellement pauvres et exploitées de l’hémisphère sud, sans oublier les populations nouvellement aliénées des sociétés sécularisées du Nord.

La troisième partie du document propose trois lignes d’action qui doivent orienter les prises de décisions dans toute la Congrégation: la préférence pour les pauvres, la solidarité avec les hommes de notre temps et la volonté de créativité. Un aspect original de La visée missionnaire est l’élargissement du concept de pauvreté aujourd’hui: «Nous les rencontrerons sous de nombreux visages». Il y a là une référence spécifique à la constitution 4 de 1966 et une énumération explicite de qui sont ces pauvres: «Le faible, le sous-employé, l’illettré, les victimes de l’alcool ou des drogues, le malade, les masses marginales des pays moins développés, les groupes minoritaires en tous pays, les émigrés, ceux qui sont exclus des bienfaits du développement» (n° 15 a). «La pire forme de pauvreté est d’ignorer le Christ» (n° 15 b).

La visée missionnaire signale prudemment que nous ne devons pas restreindre notre mission à ceux qui sont matériellement pauvres en exerçant une sorte de service d’assistance sociale. Elle invite de nouveau à être présent dans les organismes internationaux vitaux «là où s’élabore et se décide le sort des pauvres» (C 4) (n° 15 c).

L’idée des «pauvres aux nombreux visages» et celle du besoin d’exercer une influence évangélique sur les structures de la société demeureront des préoccupations constantes qui réapparaîtront dans les documents oblats qui suivront. Elles seront éventuellement incorporées dans les Constitutions et Règles de 1982 [18].

La dernière partie de La visée missionnaire fait appel à la créativité, à une réévaluation de nos engagements et au «courage de prendre les décisions concrètes exigées par l’Esprit qui nous parle à travers les besoins les plus urgents des pauvres» (n° 17 a). Reconnaissance, encouragement et soutien sont apportés à ceux qui sont appelés à exercer une profession séculière ou à participer aux luttes sociales et politiques qui conditionnent l’avenir du monde ouvrier (n° 17 d). Le même soutien est promis aux «Oblats qui se sentent tenus, en conscience, de prendre position, clairement et définitivement en faveur des opprimés, victimes de l’injustice, de la guerre ou de la violence» (n° 17 e).

Le Chapitre de 1972 ne cache pas le fait qu’il y avait «une grande diversité» de perception (n° 2), ni que l’écoute les uns des autres s’est faite «quelquefois très difficilement» (n° 13). Il est conscient, cependant, qu’il s’agit d’un «moment important de notre histoire» (n° 14). Il invite à la prudence, car ce qui semble «des tendances minoritaires» peuvent être des tendances qui indiquent une voie nouvelle pour la Congrégation. Le Chapitre ne veut pas imposer «trop tôt une unité qui risque d’être superficielle si elle oblige au silence un certain nombre parmi nous et partant élimine leur contribution à notre commune visée missionnaire» (n° 11).

On a bien tenu compte de l’appel lancé par le Chapitre à réévaluer nos engagements actuels en suivant le mouvement de l’Esprit «qui nous parle à travers les besoins les plus urgents des pauvres» (n° 17 a). Cet appel a marqué un point tournant dans plusieurs Provinces dans la redéfinition de leurs engagements et l’acceptation de ministères orientés vers les nouveaux «pauvres aux nombreux visages». On a alors laissé à d’autres certains ministères bien établis qui ne rencontrent plus les critères d’une mission vers les pauvres et les abandonnés.

3. DE 1972 A 1980

La Congrégation fait face au défi d’intégrer le ministère pour la justice dans son charisme de missionnaires des pauvres.

a. Le Chapitre général de 1974

Moins de deux ans après le Chapitre de 1972, on a dû en convoquer un nouveau à la suite de la démission du Supérieur général, le père Richard Hanley. Le choc de cet événement s’est fait sentir à travers toute la Congrégation qui cherchait encore à définir sa mission dans un monde sécularisé en pleine transformation. Cela soulevait des questions sur notre identité et notre habileté à relever les nouveaux défis de notre mission. Cette remise en question, cependant, n’était pas particulière à la Congrégation, bien que la démission et le départ du Supérieur général l’aient accentuée.

L’Église connaissait elle aussi une période de transition et de remise en question. Paul VI avait demandé au troisième synode des évêques de clarifier la relation entre évangélisation et ministère pour la justice. Le synode n’a fait que deux brèves déclarations, l’un sur l’évangélisation et l’autre sur les droits de la personne. Incapable de s’entendre sur une déclaration globale, les membres du synode ont laissé au Pape le soin de formuler les résultats de leurs échanges. Ce n’est que quelques jours après la clôture du synode que s’est ouvert le Chapitre général.

Les capitulants ont senti le besoin de s’attaquer au malaise répandu dans la Congrégation. Ils ont communiqué leurs réflexions sous la forme d’une lettre [19], où ils réaffirment notre engagement comme religieux missionnaires dans un monde qui nous interroge et nous met au défi comme en 1972.

Les nombreux défis qu’ils énumèrent touchent à tous les aspects de notre ministère. Deux d’entre eux concernent notre engagement social: «Dans un monde qui […] à cause de ses structures économiques et politiques, fabrique et secrète les pauvres, les marginaux, les silencieux, les révoltés […] comment être témoin du Christ Sauveur?» [20]

La réponse du Chapitre s’enracine dans le cœur de notre charisme: «Oblats, nous sommes appelés par Jésus Christ pour évangéliser les pauvres. Nous croyons qu’Il est l’unique Sauveur, celui qui, aujourd’hui et demain, libère les hommes. La libération qu’Il apporte n’est ni uniquement politique ni uniquement spirituelle: elle est totale […]» [21]. La réponse aux questions du monde se trouve alors dans l’authenticité et le radicalisme de notre vie religieuse consacrée, individuelle et communautaire: «[…] nous devons aller à la rencontre du Seigneur, le reconnaître «revenant aujourd’hui dans la chair, et c’est la Bonne Nouvelle incarnée dans le monde [22]». La vigueur prophétique de notre vocation est dans «le courage de la parole, le courage de la vie» [23].

Ce Chapitre a fait un pas important dans l’intégration de la mission et de la vie religieuse. Il a aussi donné un nouvel élan à la reconnaissance du ministère pour la justice comme aspect important et valable de notre mission auprès des pauvres. C’est ainsi que le Chapitre de 1974 est à l’origine des documents des deux prochains Chapitres: Missionnaires dans l’aujourd’hui du monde et Témoins en communauté apostolique.

b. Le congrès de 1976 sur le charisme

Une des priorités confiées à l’Administration générale par le Chapitre de 1974 avait été l’évaluation et le renouveau de la vie et de la mission de la Congrégation. C’est ce que traduit l’appel du Chapitre à poursuivre la recherche d’une plus grande authenticité de vie et du maintien de la force prophétique de notre vocation [24].

Sentant le besoin d’avoir des points de référence clairs, le nouveau conseil général a décidé d’organiser un congrès sur charisme. L’objectif principal de ce congrès serait d’identifier le charisme du Fondateur et de le situer ensuite dans la vie et la mission des Oblats [25].

Le congrès a signalé plusieurs éléments caractéristiques du charisme oblat: passionnés du Christ, vivant en communauté, comme religieux, pour l’évangélisation, des pauvres, pour l’amour de l’Église et «nihil linquendum inausum» [26].

Sans exclure ou minimiser aucune des autres caractéristiques, les congressistes en ont retenu quatre comme présentant une urgence pour l’évaluation et renouveau de la vie et de l’activité de la Congrégation: le Christ, l’évangélisation, les pauvres et la communauté [27].

Le congrès donne des pauvres une définition beaucoup plus large que celle du Chapitre de 1972: «C’est aux pauvres que nous devons avant tout apporter ce message de joie libératrice: aux plus délaissés humainement, ceux dont la situation crie justice devant Dieu; cela n’exclut point que nous soyons attentifs aussi à dire ce message à quiconque est en pressant besoin de cette bonne nouvelle, même s’il n’est pas démuni matériellement [28]».

Il semble y avoir eu, au congrès, un consensus sur le fait que les pauvres et les abandonnés des années 1970, sont, sans être exclusif, «les petits», «les opprimés de nos sociétés modernes». En voulant préciser quels sont les «éléments plus importants pour l’évaluation et le renouveau de la vie et des œuvres de la Congrégation aujourd’hui», le congrès affirme ceci sur les pauvres: «Notre devise comporte pour nous deux mots inséparables: évangéliser les pauvres […]. Nous sommes envoyés aux plus délaissés, ceux dont personne ne s’occupe, les plus privés de la Bonne Nouvelle. Et plus spécialement aux petits, aux opprimés de nos sociétés modernes. Sans oublier que cette situation de délaissés n’est pas le fait d’une seule classe sociale et qu’elle peut varier selon les lieux et les époques [29]».

L’objectif principal du congrès était l’étude des caractéristiques de notre identité et de notre mission, et l’unité de vie et mission. Pour demeurer fidèles à notre devise «Il m’a envoyé évangéliser les pauvres» et pour être aptes à le faire, il faut, a souligné le congrès, redevenir pauvres nous-mêmes et «entrer plus profondément dans les divers secteurs où se prépare et se vit l’existence des plus humbles pour entendre leurs appels, discerner leurs aspirations» [30].

4. LES CONSTITUTIONS ET RÈGLES DE 1982

La conception de la mission oblate, nous l’avons vu, a évolué en même temps que la perception que l’Église avait de la sienne dans le monde de ce temps. Au moment de l’ouverture du Chapitre, la déclaration du synode de 1971 sur «La justice dans le monde» avait reçu la confirmation du synode de 1974 et les explications d’Evangelii Nuntiandi. La conférence des évêques d’Amérique latine, à Puebla en 1979, et l’encyclique Redemptor Hominis de Jean-Paul II avaient rendu l’Église consciente du besoin d’une plus grande solidarité avec les pauvres et les opprimés. L’expression «option préférentielle pour les pauvres» et ses implications dans la vie et le ministère ont été graduellement acceptées dans toute l’Église. La Congrégation avait déjà accepté, en 1972, une idée plus large du «pauvre», «les plus abandonnés», les pauvres «sous de nombreux visages» [31].

Le texte approuvé par le Chapitre de 1980 ne laisse aucun doute là-dessus. Il présente la mission de l’Institut d’évangéliser les pauvres selon une nouvelle façon de comprendre l’«option pour les pauvres».

Le premier article énonce, en utilisant la formule du Fondateur, ce qu’est notre principal tâche dans l’Église: «Ils se consacrent principalement à l’évangélisation des pauvres». Reprenant l’article 3 de 1966, la constitution 5 décrit notre premier service dans l’Église: «faire connaître aux plus délaissés le Christ et son Royaume» [32]. Elle situe les délaissés en trois catégories par ordre de croissance: «les peuples qui n’ont pas encore reçu la Bonne Nouvelle»; «les groupes qu’elle atteint le moins» et «ceux dont la condition réclame à grands cris une espérance et un salut que seul le Christ peut apporter en plénitude». «Ce sont les pauvres aux multiples visages: nous leur donnons la préférence» (C 5).

Le but de l’annonce de la Bonne Nouvelle est de faire connaître aux peuples le Christ et, à la lumière de cette connaissance, les aider à découvrir leur propre dignité de personnes créées à l’image de Dieu et rachetées par le Christ (C 5).

C’est dans ce contexte et en partant de cette vision chrétienne de la personne que l’Oblat aura un rôle actif à jouer dans un autre aspect de la mission évangélisatrice de l’Église, le ministère pour la justice (R 9).

La Règle de 1982 insiste sur l’unité entre vie et mission. L’Oblat est non seulement un prédicateur mais aussi un artisan de la Parole. C’est pourquoi les articles subséquents mettront l’accent sur la solidarité avec les pauvres et les opprimés.

Le vœu de pauvreté est une façon d’être solidaire avec les pauvres et de contester les causes d’injustice: «Ce choix nous incite à vivre en communion plus étroite avec le Christ et les pauvres; il conteste ainsi les excès du pouvoir et de la richesse et proclame la venue d’un monde nouveau, libéré de l’égoïsme et ouvert au partage» (C 20).

La règle 14 exprime avec hardiesse ce souci de solidarité: «La communauté […] n’hésitera pas à utiliser même son nécessaire pour aider les pauvres».

La constitution 122 va même plus loin: «Comme la Congrégation est missionnaire par nature, les biens temporels qui lui appartiennent sont avant tout au service de la mission. Tout en pourvoyant aux besoins de ses membres, elle cherchera les moyens de partager avec les autres ce qu’elle possède, spécialement avec les pauvres».

En unissant les expressions «chercher des moyens de partager» (C 122) et «utiliser même son nécessaire» (R 14), on obtient un véritable mandat de solidarité active avec les pauvres.

Énumérant les exigences requises pour l’entrée au noviciat, la Règle dit: […] les candidats doivent […] faire preuve […] d’amour des pauvres[…]» (R 40). De plus, «les novices s’exerceront à un style de vie simple qui puisse les sensibiliser aux besoins des gens, des pauvres en particulier» (R 42). Pour compléter la formation à la mission après le noviciat, «l’occasion sera donnée [aux nouveaux Oblats] de se dévouer auprès des pauvres» (R 54).

L’usage répété des expressions «pauvres» «spécialement les pauvres» et «des pauvres en particulier» ne laisse pas de doute sur la perception qu’avait le Chapitre de 1980, dans sa révision des Constitutions et Règles, du charisme et de la mission d’aujourd’hui. Elles indiquent une préférence pour les pauvres avec tout ce que cette option implique. Le Chapitre n’a pas hésité à inclure un article comme la règle 9 sur le ministère pour la justice. Il n’a pas hésité, non plus, à indiquer les exigences requises pour l’admission et la formation des candidats, ni à donner des directives pour l’usage des biens de la communauté qui font le lien entre la mission, la vie et la solidarité avec les pauvres et les opprimés. Le Chapitre général de 1986 précisera dans le même sens les exigences de la mission des Oblats aujourd’hui; il manifestera un souci marqué pour une action évangélique en faveur de la justice.

5. LE CHAPITRE GENERAL DE 1986: MISSIONNAIRES DANS L’AUJOURD’HUI DU MONDE

Le thème principal du Chapitre de 1986 a été la mission de la Congrégation dans le monde d’aujourd’hui. Les membres du Chapitre ont discerné six défis particuliers qui nous interpellent de façon pressante. Le premier que présente le document Missionnaires dans l’aujourd’hui du monde est la mission auprès des pauvres: «[…] nous croyons que notre mission doit être de plus en plus une mission auprès des pauvres, intégrant le ministère pour la justice» (n° 5).

Cette préoccupation constitue la trame de tout le document. Pour le Chapitre chacun de ces six défis fait partie de la même mission d’évangéliser les pauvres et les plus délaissés.

Le titre de la première partie associe mission, pauvreté et justice. Elle commence par un énoncé sombre: «Le fossé croissant entre riches et pauvres dans le monde d’aujourd’hui est un scandale devant lequel nous ne pouvons pas rester indifférents» (n° 10). Elle décrit ensuite la situation déprimante du monde qui engendre de «nouveaux pauvres nombreux et souvent sans-voix: chômeurs, réfugiés politiques, minorités méprisées» (ibidem). Elle indique certaines des nombreuses causes de structures économiques et politiques injustes. Regardant le monde à la lumière de l’Évangile, nous voyons Jésus qui «s’identifie aux affamés, aux malades, aux prisonniers. Il veut qu’on le découvre dans ceux qui souffrent, qui sont abandonnés ou persécutés pour la justice» (n° 13).

Où se situe l’Oblat dans ce contexte? Le Chapitre répond par une affirmation concise où il décrit les divers aspects de la mission évangélisatrice de l’Église telle qu’énoncée dans les derniers documents pontificaux: «Nous les Oblats, nous sommes envoyés évangéliser les pauvres et les plus abandonnés, c’est-à-dire proclamer Jésus Christ et son Royaume (C 5), témoigner de la Bonne Nouvelle aux yeux du monde, susciter des actions capables de transformer les personnes et les sociétés, dénoncer tout ce qui fait obstacle à l’avènement du Royaume» (n° 14).

Faisant référence au vœu de pauvreté, le Chapitre ajoute: «Nous choisissons d’être pauvres afin d’entrer plus parfaitement en communion avec Jésus et les pauvres» (n° 16). Ce n’est que de cette façon que nous pourrons «apprendre à regarder l’Église et le monde de leur point de vue […]. Nous sommes alors évangélisés par eux et nous devenons, parmi eux, de meilleurs témoins de la présence de Jésus qui s’est fait pauvre pour libérer la personne humaine et la création tout entière» (ibidem).

Le témoignage de détachement évangélique n’est possible qui «si nous savons sans cesse nous encourager et nous interpeller à une conversion en ce domaine». Il doit paraître dans notre vie personnelle et communautaire. Nos communautés doivent être perçues comme des lieux où se vit cette libération que nous annonçons, si l’on veut que notre annonce d’un Dieu libérateur ait de la crédibilité (n° 18). Nous soutiendrons les pauvres là où ils «tentent de prendre en main leur avenir» (n° 19). De plus, «nous sommes prêts à assumer les conséquences de nos positions en faveur de la justice» (n° 20).

Cette première partie se termine par six recommandations. 1. Se laisser remettre en question, dans la prière, par l’appel à servir les pauvres et les plus abandonnés (n° 23). 2. Réévaluer notre style de vie et les biens à notre usage (n° 24). 3. Établir nos communautés dans les quartiers pauvres (n° 25). 4. Partager avec les pauvres nos ressources, en argent, en personnel et en compétences diverses (n° 26). 5. Agir en faveur des pauvres et nous rendre compte que nous pouvons être cause de pauvreté par nos attitudes, les valeurs que nous défendons, notre style de vie, nos choix sociaux et politiques (n° 27). 6. Étudier les causes de la pauvreté (n° 28).

6. LE CHAPITRE GENERAL DE 1992: TEMOINS EN COMMUNAUTE APOSTOLIQUE

Décrivant les besoins actuels de salut, le document du Chapitre de 1992 Témoins en communauté apostolique présente un monde assailli de plusieurs maux, caractérisé par la fragmentation, la violence, l’oppression et l’injustice (n° 2). La réponse des Oblats aux «besoins de salut des hommes» (C 1) – surtout des pauvres – est de chercher à «nous rassembler autour de la personne de Jésus Christ de façon à créer une solidarité de compassion» (n° 6). C’est pourquoi «nous choisissons donc la communauté comme un moyen pour nous laisser évangéliser sans cesse et être témoins de la Bonne Nouvelle» (n° 7).

«Rechercher activement la qualité de notre communauté, de notre être […], voilà bien notre première tâche d’évangélisation» (n° 7). «La communauté que nous formons […] conteste de façon prophétique l’individualisme du monde et l’arbitraire du pouvoir, source du malheur de tant de pauvres» (n° 8).

Notre «rôle n’est pas avant tout de transmettre une doctrine, mais bien d’accomplir une démarche concrète de paix, dans la vérité et la justice» (n° 17). Pour que notre style de vie corresponde aux valeurs professées par les vœux de religion, «une conversion recommencée chaque jour est indispensable à qui se veut témoin crédible» (n° 18).

Le Chapitre demande une révision et une évaluation régulières de la qualité de notre témoignage en toutes ses composantes, parmi lesquelles la justice et la paix (n° 19). «Comme la crédibilité de notre témoignage dépend en partie de notre engagement pour la justice, le Chapitre invite l’Administration générale, pendant les six années à venir, à stimuler les Oblats dans leur engagement envers les plus faibles» (n° 21).

Le choix d’approfondir la qualité de notre vie et de notre être, comme individus et comme communautés, a des implications. Le Chapitre exprime à ce sujet «une volonté très ferme de mettre en œuvre efficacement Missionnaires dans l’aujourd’hui du monde, d’être cohérents avec nos Constitutions et Règles et nos vœux […] qui font de nous des témoins, signes crédibles en communautés apostoliques» (n° 24). Le reste de ce paragraphe résume bien l’esprit du Chapitre de 1992 et mérite qu’on le médite: «Ce qui anime, sous-tend et justifie toute cette démarche c’est l’anxiété missionnaire pour l’homme d’aujourd’hui. «En tant que missionnaires, il nous faut entendre le cri des personnes et des groupes qui aspirent au salut, se laisser interpeller par ce cri, y répondre par la prière et la disponibilité, le répercuter dans son entourage […]». Ce texte du rapport du Père Général (n° 12) a trouvé beaucoup d’écho parmi nous. C’est pourquoi nous décidons d’être proches des pauvres qui ont notre préférence (C 5), sans négliger les riches, qui souvent prennent les décisions qui affectent le sort du monde. Nous décidons de dialoguer avec la société, en solidarité avec les personnes de bonne volonté, spécialement ceux qui sont engagés […] dans la poursuite de la justice et de la paix. Nous prenons le risque à la fois de cautionner notre monde et de l’interpeller, de reconnaître ce qui est bon en lui, tout en le défiant de façon prophétique. Ainsi accompagnerons-nous le douloureux accomplissement d’un monde en recherche de réconciliation» (n° 24).

CONCLUSION

Frappé par l’état d’abandon spirituel des peuples pauvres de son temps, saint Eugène de Mazenod a fondé une équipe de missionnaires pour les évangéliser. Des générations d’Oblats, désirant demeurer fidèles à son inspiration, ont cherché à découvrir qui étaient les personnes abandonnées de leurs temps. Leur discernement les a conduits à préférer les pauvres et les marginaux. Ces dernières années surtout, ils ont montré un intérêt prononcé pour un engagement réel envers ces gens, pour une solidarité qui se manifeste dans leur style de vie comme dans le choix de leurs ministères. Comme en 1816, dans leur collaboration à la mission évangélisatrice de l’Église, c’est vers «les pauvres aux multiples visages» qu’ils vont de préférence.

Ronald LaFramboise