Présence oblate :1883-1971. Situation géographique : Ottawa, Ontario.

Les scolastiques oblats de l’Est du Canada connurent bien des déplacements avant de se fixer définitivement dans leur établissement d’Archeville (Ottawa-Est) en 1885. Ils furent réunis au Collège d’Ottawa, au noviciat de Lachine, de nouveau au Collège pour passer enfin dans un édifice parfaitement adapté aux besoins de leur formation religieuse et intellectuelle. On avait même pensé à les envoyer aux études en France ou ailleurs.

On y songea le 15 avril 1854, lorsque le Conseil provincial détermina que les scolastiques passeraient en France après leur noviciat, projet qui n’eut pas de suite. Mais on y songea de nouveau en 1868. Le père Florent Vandenberghe, provincial, entretenait le Supérieur général de ce projet, sans oublier de mentionner que les pères du Canada n’y étaient pas favorables. Il aurait été difficile de ramener en Amérique tous les scolastiques, une fois le mouvement engagé de les faire passer en Europe. Bien plus, en retirant les scolastiques d’Ottawa, on privait les sujets de cette éducation indispensable qu’ils n’auraient nulle part ailleurs.

À l’occasion de sa visite canonique en 1876, le père Louis Soullier revint sur le projet de former les scolastiques en France, mais le Conseil général refusa cependant le 6 novembre 1876. Désormais, on ne parlera plus de la formation en France, mais on songea bientôt à envoyer des sujets aux universités romaines. Le 18 septembre 1883, le Conseil général note que deux Canadiens, les frères Étienne Giroux et John-Joseph Gallagher, feraient leurs études au scolasticat de Rome. Par la suite, plusieurs les suivront.

En 1888, on pensa un moment à un système d’échange de scolastiques avec les provinces de Ceylan, du Natal, d’Angleterre et d’avoir quelques scolastiques à Rome, afin de permettre aux divers éléments de la Congrégation de se connaître. Finalement, les étudiants canadiens étudièrent dans la province, à l’exception de quelques unités à Rome. Par contre, le scolasticat d’Ottawa reçut de nombreux sujets de l’étranger.

C’est en 1878, dans sa séance du 4 janvier, que le Conseil général prit connaissance du désir du visiteur canonique de séparer le scolasticat du collège. On pensait que le noviciat Notre-Dame-des-Anges de Lachine pourrait contenir novices et scolastiques en y ajoutant une aile. La même année, on proposait de placer les scolastiques à Hull, mais la proposition n’eut pas de lendemain. Ainsi les discussions durèrent encore quelque années. 1883 marque une étape importante pour le scolasticat, puisqu’on décida sa séparation complète du Collège et qu’il reçut sa pleine autonomie. Durant ses séances de février 1883, la Conseil provincial décide, en réponse aux désirs de l’Administration générale, de séparer le plus tôt possible le scolasticat du collège. En conséquence, le père Tabaret achèterait un terrain de quarante arpents attenant à la ferme du collège sur les rives de la rivière Rideau à Archeville (Ottawa-Est). Plusieurs projets furent étudiés et on décida de s’établir à la ferme du collège. Les plans furent étudiés attentivement. On commença les fondations à l’automne de 1883 sous la direction du père Edmond Gendreau, de l’université, puis au printemps de 1884 la cons- truction elle-même débuta. La maison fut ouverte avant l’hiver. Le printemps et l’été 1885 furent consacrés aux travaux intérieurs et la maison fut prête à servir pour l’année scolaire 1885-1886.

Le père Jean-Michel Duvic fit l’histoire de la construction. Au moment où l’on décida la construction, les scolastiques étaient au nombre de trente-cinq, alors qu’il n’y avait de place que pour une quinzaine au collège. On commença à creuser le sol dès l’automne 1883. Le père Mangin, modérateur des scolastiques, donna le premier coup de pioche et les scolastiques s’armèrent de pics et de pelles; ils stimulèrent si bien les employés qu’au printemps suivant les murs étaient sortis de terre. Enfin, en septembre 1885, le modérateur écrivait à ses scolastiques, en vacances à Maniwaki, que tout était prêt à Archeville.

La propriété formait un carré de mille deux cents pieds de côté, soit quarante arpents ou treize hectares où l’on trouvait un vaste jardin, un petit bois et un cimetière, sans oublier l’historique maison blanche de cent quarante pieds sur vingt-huit, arrangée avec beaucoup de soin par le père Tabaret et qui avait servi de maison de repos pour le collège.

On possédait désormais un scolasticat magnifique, approprié à son rôle. Le 1er septembre 1885, le père Giles Van Laar vint le premier habiter la maison. Il fut bientôt suivi, le 4 septembre, par le père supérieur, le père Joseph Mangin, et le 8, fête de la Nativité de la sainte Vierge, le père Michel Froc ramenait vingt-huit scolastiques de Maniwaki. Le lendemain, le noviciat envoyait cinq scolastiques et deux frères convers. Le 10 septembre 1885, le provincial avertit le père Fabre que les scolastiques étaient installés à Archeville.

À partir de ce jour, on travailla à compléter l’ameublement de la maison et l’aménagement de la propriété. On planta des ormes le long de l’allée à côté de la maison, qu’on connaîtra sous le nom de « l’allée de la cathédrale ». Chaque année apportera ses embellissements de la propriété. En 1898, le Conseil général donna l’autorisation d’installer l’éclairage électrique du scolasticat. Le 27 janvier 1899, ce fut le téléphone qu’on installa au prix de 35 $ par année.

Le Codex historicus mentionne que Maniwaki est encore le lieu de vacances des scolastique en 1886. Ils s’y rendirent en canot par la rivière du Lièvre, les lacs et la rivière Gatineau et en revinrent le 20 août. Puis ce fut La Blanche. Le Codex note, le 9 juillet 1894, le début de la construction d’une petite chapelle à La Blanche où on passera désormais une partie des vacances. Le 13 septembre 1896, le père Duvic était autorisé à acheter la propriété. Le terrain mesurait cent vingt-trois acres, appartenant à Dame veuve Joseph Brassard. En 1899, quatre frères convers allèrent à La Blanche au mois de juin construire une maison comprenant un réfectoire et un dortoir. La communauté s’y rendit en juillet pour une durée de quinze jours.

On possédait donc une maison de vacances pour les scolastiques.

Le 24 octobre 1867, le père Tortel, modérateur des scolastiques se plaignait au provincial que le cours d’études en théologie était loin d’être complet. Il fallait, selon lui, un peu d’Écriture sainte, de droit canonique et d’histoire de l’Église. Il peut nous sembler curieux que ces matières soient absentes du cours d’études, mais la chose était commune à l’époque, au Canada surtout, où les grands séminaires étaient rares.

Avec la nouvelle année scolaire, le père Lepers vit à améliorer l’enseignement. Il averti le provincial que l’on avait interverti l’ordre du cours afin de le répartir sur quatre ans. Il voulait réserver toute la partie morale au cours régulier et fortifier les scolastiques dans l’étude de la philosophie et de la théologie dogmatique, car c’était la partie faible des études et les frères y gagneraient beaucoup en progressant dans ces deux points.

Le père avait commencé à mettre de l’ordre dans les cours, en suivant régulièrement les traités de morale. Il constata un peu plus tard la faiblesse des examens. Avec l’installation d’un scolasticat séparé et indépendant du collège en 1885, les choses avaient pu s’améliorer sensiblement. Le cours était complet et parfaitement organisé.

En 1891, un événement important dans la vie intellectuelle du scolasticat eut lieu lors de la visite canonique du père Aimé Martinet en 1887. Ce dernier décréta que le scolasticat ferait désormais partie de l’Université et que les scolastiques se prépareraient aux grades. Au cours de l’année 1894, le père Joseph Lefebvre, provincial, fit la visite canonique du scolasticat et insista sur les études en rappelant les prescriptions laissées par le père Martinet, à savoir que tous les frères devaient se préparer aux grades universitaires en philosophie, en théologie et en droit canonique dès l’érection de ces facultés.

À l’été 1891, le père Mangin proposait l’inauguration d’un nouveau cours pour les jeunes pères : «il ne s’agissait de rien moins que la création d’un nouveau grand cours pour préparer à l’œuvre si importante des missions nos jeunes pères qui, jusqu’à présent, ont été entièrement laissés à eux-mêmes. Il n’y a personne tant soit peu au courant des choses, je pense, qui conteste l’utilité voire même la nécessité d’une semblable institution. » Il ajoutait que le plan proposé par le supérieur général était simplement parfait. Malheureusement, le plan du père Mangin n’eut pas de suite.

Il fallut penser aussi à organiser une bibliothèque. On se dota des instruments de travail indispensables. On s’en tint d’abord aux grands auteurs, puis elle s’enrichit peu à peu et devint une bibliothèque assez importante à mesure que les moyens le permettaient.

On a pu trouver surprenant que certaines permissions, en apparence de peu d’importance, comme celle de l’installation du téléphone, dussent être référées à la maison générale de France. La raison en est toute simple. Les scolasticats, à cette époque, relevaient directement de la maison générale. Après la construction du scolasticat d’Ottawa, le provincial eut un certain rôle à jouer dans la marche de cette maison, mais la haute direction n’en restait pas moins à l’Administration générale. Le 5 août 1885, le père Fabre avertit le père Antoine, provincial, que le personnel du scolasticat ne faisait pas partie de la province du Canada, mais que le provincial devait veiller sur les intérêts temporels de l’institution. Dans une circulaire aux pères de la province, le père Antoine annonçait que l’édifice du scolasticat appartenait à la province, mais que son entretien relevait de la maison générale.

Eugene Lapointe OMI